Le Noël des Reîtres
Anonymous, 1590
Il est un petit l'ange
Qui jamais li mange:
Dit à moi l’autri jour :
-- Camarade Alimand,
Prends ton juste-au-corps
Et ton l'habiliment.
Fiens foir sti pouponnee.
Quoique tout p'tit, li est grand.
Li l'être dans l'étable ;
Li l'être misérable ;
Li n'avoir point de coffre ;
Li n’avoir rien qui fiauffe ;
Li l'être paufriment
Bien miserablement
J'ai dit à Monsieu l'ange :
- Montrés moi sti grange,
Pour y voir sti pouponne
Qu'il est si paufriment.
Pour moi, n'i falloit faire
Un grand trinquement.
Moi saffre bien faire
Un beau p'tit compliment :
Moi parlerai à le père
Moi parlerai à le mère
Moi saffre bien dire
Moi reste avec le sire
Le maiesté du roi ;
Moi le dis franchement.
-- Bon jour, roi di gloire.
C’est moi, qui li fiens foir.
Comment li portes fous
Depuis l’autri demain ?
Pourquoi vous lefir vous
De si grante matin ?
Li l'être dangireux
D'y prendre li sirin.
Ni pleures point, j' t'en prie !
Mon demoisell' Marie,
Baille-moi lis langes
Que je les fiauffe au p'tit l'ange.
Li l'être une bonne garçonne :
Car moi le saffre bien (I).
(i) Noëls anciens et nouveaux. - Châlons sur.Marne, Mercier. - Le XVIe siècle vit introduire dans les armées françaises les Suisses et les reîtres.- Ce noël, dont la tra dition se maintenait en Champagne, n’est qu’une mauvaise plaisanterie contre les soldats étrangers.