Le duel singulier

Dorvigny, 1800



LE DUEL SINGULIER

COMEDIE EN UN ACTE ET EN PROSE;

Représentée, pour la première fois , sur le Théâtre de

l'Ambigu-Comique , le 28 Vendémiaire an 9.

Par le citoyen DORVIGNY.

A Paris,

Au magasin de pièces de Théâtres , rue des Prêtres St.-Germainl'Auxerrois , n°. 44, en face de l'Eglise.

An IX.

Les Exemplaires ont été fournis à la Bibliothèque nationale.


PERSONNAGES. ARTISTES
  • Mistriss GEFFERSON Mme. Bourgeois
  • STRAFFORT, baragouinant, Anglais-Américain Corse.
  • BELTON , Anglais- Américain Boischeresse.
  • VALCOUR, jeune Français Tautin.
  • FIJEAC, gascon au service de Valcour Rafille.
  • JACQUES, nègre au service de Strafford, parlant patois Platet.

La Scène est à Boston , dans une maison où logent mistriss Gefferson , Strafford et Valcour.

C'est le matin. Le théâtre représente un salon commun à trois appartemens ; il y aune table garnie pour écrire.


LE DUEL SINGULIER

COMEDIE EN UN ACTE ET EN PROSE;

Représentée, pour la première fois , sur le Théâtre de

l'Ambigu-Comique , le 28 Vendémiaire an 9.

Par le citoyen DORVIGNY.

A Paris,

Au magasin de pièces de Théâtres , rue des Prêtres St.-Germainl'Auxerrois , n°. 44, en face de l'Eglise.

An IX.

Les Exemplaires ont été fournis à la Bibliothèque nationale.


PERSONNAGES. ARTISTES
  • Mistriss GEFFERSON Mme. Bourgeois
  • STRAFFORT, baragouinant, Anglais-Américain Corse.
  • BELTON , Anglais- Américain Boischeresse.
  • VALCOUR, jeune Français Tautin.
  • FIJEAC, gascon au service de Valcour Rafille.
  • JACQUES, nègre au service de Strafford, parlant patois Platet.

La Scène est à Boston , dans une maison où logent mistriss Gefferson , Strafford et Valcour.

C'est le matin. Le théâtre représente un salon commun à trois appartemens ; il y aune table garnie pour écrire.



SCENE PREMIÈRE.

STRAFFORD sort de chez lui, à droite , suivi de JACQUES, domestique négre

STRAFFORD

JACQUES , je entrer ici chez mistriss Gefferson ; Belton il doit venir voir moi ; tu feras attendre lui et viendra avertir moi quand il être arrivé.

JACQUES.

Li , bon maître ; toi pas peur , moi va pas manquer.

(Il rentre. )


SCÈNE II.

STRAFFORD va pour entrer chez mistriss àgauche. VALCOUR sort de chez lui , du fond , et arrête Strafford.

VALCOUR, d'en haut

Un mot, s'il vous plaît monsieur

STRAFFORD, se retournant

A moi vous parler ?

VALCOUR.

A vous-même; vous ressouvenez-vous d'avoir été hier au soir à la taverne de Lyoll- Boy?

STRAFFORD.

Oui , bien.

VALCOUR.

Vous ressouvenez-vous, de m'y avoir vu ?

STRAFFORD.

Très-peu.

VALCOUR.

Mais vous devez vous rappeller d'avoir eu une contestation fort vive avec moi?

STRAFFORD.

Point du tout.

VALCOUR.

Cela est surprenant ; une mémoire si courte risque de vous faire du tort.

STRAFFORD.

Pourquoi?

VALCOUR,

C'est qu'on regarde assez souvent comme manque de bravoure, l'oubli d'une dispute vive et qui a été publique.

STRAFFORD.

C'est mal fait ; un honnête homme qui avait raison , il pouvait oublier l'étourderie de celui- là qui avait manqué ; mais l'autre honnête homme qui avait tort , il devait souvenir lui , pour plus avoir encore ein autre fois.

VALCOUR.

Aussi je m'en souviens , monsieur , et je viens pour le réparer.

STRAFFORD.

Alors il être bien fait; j'estime vous davantage , et je pardonne de bon cœur.

( Il lui tend la main.” )

VALCOUR , fièrement.

Je ne veux pas de votre pardon ; c'est une offense que vous me faites à votre tour .... et si je vous ai offensé hier le premier , la réparation que je viens vous faire , c'est de vous proposer de me couper la gorge , ou de me brûler la cervelle avec vous.

STRAFFORD.

Charmante réparation ! ....

VALCOUR.

C'est la seule entre gens d'honneur.

STRAFFORD.

Très-bien il veut dire que , pour réparer l'offense que vous convenez avoir fait à moi hier , vous venez bonnement m'offrir de tuer moi aujourd'hui !

VALCOUR.

Oui , monsieur, ou vous donner l'occasion de me tuer moi-même.

STRAFFORD.

L'occasion il être fort agréable assurément ; mais , mon cher monsieur , il tenter pas moi di tout.

VALCOUR, dédaigneusement.

Je vous entends : c'est-à dire que vous aimez mieux être deshonoré , et que vous consentez que je publie par-tout que vous êtes un lâche.

STRAFFORD, vivement,

Point du tout ; je deffendre bien au contraire.

VALCOUR,

Hé bien donc , pour m'en empêcher , il n'est qu'un moyen; c'est de vous battre avec moi.

STRAFFORD, à part.

Quel diable d'homme ! il être enragé pour courir à son mort ! ....

(Haut. )

Vous vouloir donc absolument tout-à-fait , monsieur?

VALCOUR.

Oh! très -absolument ; ou vous allez sortir avec moi pour soutenir votre honneur , ou je sors tout seul , pour aller déclarer par-tout que vous n'en avez pas.

STRAFFORD , piqué , mais avec une colère froide.

Gaddem ! il être trop fort celui-là ! .... La vie il être certainement beaucoup .... mais la honneur il être encore plis davantage , et vous va connaître qu'il rester encor la- dedans.

( Il se touche le cœur. )

VALCOUR impatienté.

Eh ! c'est ce que je deinande ; marchons , monsieur.

STRAFFORD, l'arrestant.

Ecoute ein instant. Je comprendre à stheure véritablement que , pour sauver l'honneur à nous deux , il faut qu'une il perde la vie , et je consentir tout de bon ; mais j'être bien-aise d'avertir vous que , si j'aimais pas à battre moi , il n'être pas poltronnerie , ... il être prudence. Monsieur jeune homme.... informevous de Strafford ....à l'épée d'abord , je n'avais pas ma pareil , ni sur la sabre non plis ... et pour la pistolet , à cinquante pas , je moucher ein chandelle , ou je couper ein balle sur la lame de couteau ..... et si je batte avec ces avantages , je deviendre ein assassin ! la loi même il avait deffendu pour moi.

VALCOUR.

Eh bien , monsieur , je vous relève de cette loi-là , Et je vas vous signer d'avance que je vous pardonne ma mort,

STRAFFORD.

Très-bien , monsieur ; vous il être brave beaucoup ! ... mais moi , je serais pas si je profitais. Ecoute donc bien mon condition pour égaliser le sort des armes , sans quoi je batte pas.

VALCOUR

Oh ! que de détours ! dites-la donc vite , cette condition ; car je commence à mal augurer de vous.

STRAFFORD.

Presser pas vous encore tant ; vous verra bientôt. Réfléchir seulement un peu , et dire- moi si vous pense bien sérieusement que notre honneur il voulait qu'un de nous deux il meure.

VALCOUR, vivement et avec humeur.

Eh morbleu oui , monsieur , c'est obligé , et cela devrait être déjà fait.

STRAFFORD , toujours froidement , mais fermement.

Bon il va pas tarder non plis , et mon manière il étre bien aisée et bien sûre . Attendre-moi là deux minutes.

(Il rentre chez lui. )


SCÈNE III.

VALCOUR, seul.

AH monsieur l'Anglais , malgré votre sang-froid et votre fermeté affectée , vous m'avez bien l'air de n'être pas dangereux.....

( Il se promène. )


SCENE IV.

VALCOUR, STRAFFORD revient de chez lui.

STRAFFORD, plus lestement,

DONNE la main , mon brave ; vous va être content toute suite. Voilà ein bon pistolet carabiné et portant bien ses trois balles. Il être bien chargé , bien amorcé , avec ein bonne pierre d'agate bien préparée ..... Jamais il avait pas ratté encore . pour..avancée. et je garantis

(Il le pose surla table qu'il a un peu)

VALCOUR.

Eh bien où est l'autre pareil ?

STRAFFORD,

Non , il faut pas davantage qu'une. Quand on se batte avec deux , chacune la sienne , on se manquait , on rechargeait , on recommençait , et les témoins ils arranger pour vous et réconcilier ,,, .... et on paraître brave à trop bon marché..... Ici , tout ça il n'être pas de même. Voilà le pistolet toute prête entre nous deux..... Nous i va jouer pair ou non...

VALCOUR, surpris,

Comment! jouer !

STRAFFORD,

Oui , monsieur , quand on être décidé , la vie il n'être plis rien qu'un jeu,,... Ou bien , nous va jetter les dez au plis haut point , ou avec les cartes .... comme vous voulez. , .. , Celle- là qui va gagner prendre la pistoler, et il espédier l'autre à son volonté.

(Il prend un siége , et s'assied devant la table. )

VALCOUR, un peu ému.

Oh oh ! vous avez-là une singulière façon....

STRAFFORD, avec sang froid.

Singulière , si vous trouvez ; mais il être bien sûre... Et puisque vous il être décidé , il n'y il n'y avait pas la meilleure et la plis honnête ; personne il avait l'avantage... Allons , monsieur , voilà les dez , ou voilà des guinées ou voilà des cartes.....

(Il met tout cela sur la table avec un cornet pour les dez. )

Choisir vous-même à-présent le jeu qu'il conviendra mieux pour vous

( Durement. )

Ou bien , je dire , moi , à mon tour , que vous il être un lâche , et que vous il avait peur pour mourir,

VALCOUR, affecté.

Moi , peur ! allons , monsieur , je suis décidé , et voilà votre dernier moment , ou le mien. Je prends les dez.

(Il remue le cornet. )

Le plut haut point aura le pistolet,

STRAFFORD.

Bon , je suis content ; roulez.

( Valcour jette les der sur la table. )

Il y a 15 ; vous avez beau jeu. A moi à- présent. Mette les dez vous-même.

( Il les remue ensui et les jette. )

18. La pistolet il être à moi.

( Il le prend. )

VALCOUR, fermement.

Eh bien , monsieur , servez-vous - en.

( Il se présente. )

Mais ne vous flattez pas que j'aie peur. Tirez.

STRAFFORD.

Ah! vous il être donc toute prête pour mourir ?.

VALCOUR,

Oui , monsieur.

STRAFFORD.

Oh bien ! moi , j'être pas encore en disposition pour tuer ; mais il être tout de même. Pensez que vous il être mort. Allez faire votre affaire encore , je permettais à vous. Voilà assez à st'heure pour contenir votre vivacité. Vous être brave et honnête ; mais souviendre-vous bien que la pistolet il être à moi , et que je regarder vous comme mort. Adieu , monsieur.

( Il ramasse toutes ses affaires avec sang-froid, et rentre chez lui. )


SCENE V.

VALCOUR , seul , et interdit.

Je suis confondu de cette aventure .. et me voilà dans une situation indéfinissable ! ... Cet homme est maître de ma vie , et il me la laisse ... .. J'aimerais autant , je préférerais même qu'il me l'eût ôtée dans le moment d'effervescence ... je serais quitte de tout ... au lieu que l'obligation que je lui ai me pèse et m'humilie..... Mais enfin , puisqu'il me laisse vivre , profi- tons de son honnêteté . et allons réfléchir sur ma position.

(Il rentre chez lui , aufond. )


SCÈNE VI.

BELTON , sortant de chez mistriss Gefferson ,avec un air chagrin.

CERTES, je ne m'attendais pas à cette fâcheuse nouvelle, Il faut que j'aille consulter mon ami Strafford , et que je cherche avec lui les moyens de parer ce coup si fatal à mon amour.

( Il va pour entrer chez Strafford.)


SCENE VII.

BELTON, STRAFFORD , sortant de chez lui.

STRAFFORD , affectueusement.

AH! mon cher Belton , j'attendais pour toi. Tu as bien tardé pour venir.

BELTON.

Hélas ! mon ami , tu me vois au désespoir. Je sors de chez mistriss Gefferson , où j'avais été pour saluer ma chère miss Charlotte. Je l'ai trouvée dans la dernière affliction ; et elle m'a appris que sa mère lui avait ordonné de se préparer à épouser un homme qui l'a éblouie par ses richesses , et sur- tout par la faveur dont il s'est vanté de jouir auprès du ministre.

STRAFFORD , avec chagrin.

Comment toi i ne serait pas mon beau - frère ! .... Oh si fait. Je voulais épouser moi miss Henriette Gefferson , et je voulais encore que toi il épouse son sœur , miss Charlotte .... Attendre ein peu , j'allais toute suite faire entendre raison pour son mère ... Mais dire moi encore , qui donc il être cette rival qui voulait supplanter toi ?

BELTON.

C'est un Français qui est ici depuis peu.

STRAFFORD..

Un Français ! ... Et comment il appeller lui ?

BELTON.

Miss Charlotte m'a dit que c'était monsieur Valcour, et qu'il s'est mème venu loger dans cette maison depuis hier.

STRAFFORD, vivement par amitié.

Valcour ! .... Oh bien , prendre courage , et n'avoir plis peur. Valcour il pouvait pas nuire à toi ; il être mort.

BELTON.

Mort ! .. qu'est-ce que tu me dis- là ? Je l'ai vu encore hier au soir , et bien portant.

STRAFFORD.

Hier il était possible .... Mais aujourd'hui , à st'heure , je dire à toi qu'il n'être plis vivant.

BELTON.

Quel conte encore une fois , cela ne se peut pas.

STRAFFORD.

J'assure toi qu'il être véritablement. Toi i va voir bien vite.

( Il écrit à la table)

( Il dit haut en écrivant. )

« Monsieur , un homme » qu'il être mort , il pouvait pas épouser miss Char- » lotte Gefferson , la prétendue de mon ami intime » Belton. J'espère que si vous , il pense être encore » vivant , vous va faire voir que vous il vivre avec » honneur».

STRAFFORD.

(Il ploie la lettre , se lève , et la montre à Belton , en lui disant)

Voilà tout.

BELTON.

Eh bien , après ; que vas-tu faire de cette folie-là 1

STRAFFORD.

J'allais envoyer pour lui et toute suite , toi n'avoir plis de rival.

( Il appelle à sa porte . )

Oh ! Jacques¹ .

(Jacques vient)


SCÈNE VIII.

LES PRÉCÉDENS , JACQUES.

JACQUES.

QUI çà maîte , voulet moi ?

STRAFFORD, à Jacques.

Entrer chez monsieur Valcour , donner cette billet là , et porter le réponse.

JACQUES,

Moi couri.

(Il entre chez Valcour )


SCENE IX.

STRAFFORD,BELTON.

STRAFFORD,

TOUT-A-L'HEURE toi va savoir.

BELTON.

Mais je ne te comprends pas...

STRAFFORD.

Il être tout-à-fait clair, miss Charlotte il être pour toi. Viendre avec moi chez mistriss Gefferson ; je vou lais faire ton raccommodement.

BELTON.

Elle est sortie pour aller solliciter une place pour son fils sir Henri.

STRAFFORD.

Eh bien , nous attendre pour elle. Je voulais pas que toi aller avant que la paix il être fait entre vous.

BELTON.

Mais , mon cher , encore une fois tu n'y penses pas.. Tes plaisanteries sont hors de saison. Je t'assures que rien n'est plus sérieux , et que miss Charlotte vient de m'affirmer elle-même que sa mère lui avait expressément défendu de recevoir dorénavant mes visites,

STRAFFORD.

Il prouvait rien du tout ça. La mère il savait pas encore que monsieur Valcour il être mort ; mais quand il va savoir, il pouvait plis penser à donner lui son fille.

BELTON.

En vérité , mon pauvre Strafford , tu m'inquiètes toimême à présent avec tes propos incompréhensibles ! Est-ce que ta raison est dérangée ? Comment tu me dis que Valcour est mort , et tu lui écris ! .... Remarque donc la contradiction .

STRAFFORD.

Il n'y a pas du tout , et toi va convenir avec, Justement, voilà Jacques , écoute son réponse.


SCÈNE X.

LES MÊMES, JACQUES revient de chez Valcour , avec un papier.

STRAFFORD.

EH bien ! Jacques ? ....

JACQUES.

Oh ! maîte à moi , ça monchié-là li fou !

BELTON, à part.

Je ne sais pas si mon pauvre ami est plus raisonnable.

JACQUES.

ah vlà li tourné. Quand li fini miré billet à vous , grands yeux , et ouvri grand bouche , comme pour li va mangé moi.... Après ça , li couri grands pas par tout la chambe , comme pour sauver li ...... Après li sauté sus son zépée , li tiré dehors fourreau , et pis prendre pistolet et mordé dans son canon.... Pendant moment là , moi tremblé et moi demandé grace pour li..... . …………… . Mais li diré moi : « N'a pas contre toi que moi n'en a » colère ; toi , pauvre guiabe ! .... » Hélas ! oui , monchié , moi diré ; moi , pauvre saclave , jamais n'en a pas faire di mal à vous..... Enfin pourtant , li jetté son zépée , li remetté pistolet dans son place , li prendre son plume , li assisé tranquille , et li fini écrire sa billlet là moi porté vous. Ah vlà li.

( Strafford prend le billet, et fait signe à Jacques de rentrer ; Jacques s'en va . )

STRAFFORD lit le billet haut.

» Vous avez raison , monsieur , je suis mort pour vous et pour votre ami » .

( Il parle. )

Toi voir lui mort……….

(Il liz. )

« Je sens que je ne dois pas disputer » à Belton le cœur de miss Charlotte , sur- tout puis- » qu'elle l'aime , et je la lui cède. Valcour , mort ou » vif à votre choix , mais brave et honnête Eh bien ! toi comprendre à présent.

BELTON.

Moins que jamais ; c'est absolument une énigme pour moi.

STRAFFORD.

Mais , du moins , toi comprendre bien qu'il céder miss Charlotte pour toi ?

BELTON.

Je le vois , et c'est ce qui m'étourdit davantage. Estce que la tête vous tourne à tous deux ? ... Que signifie ce stile baroque de vos billets ?

STRAFFORD.

Il signifier , mon cher , que toutes les deux nous être vraiment braves et honnêtes comme il dire fort bien.... mais voilà mistriss ; nous va parler avec.


SCENE XI.

LES MÊMES, mistriss GEFFERSON vient de dehors ; ils la saluent tons deux : elle témoigne de l'embarras en voyant Belton , et veut rentrer chez elle sans parler, après avoir rendy le salut....

STRAFFORD arréte mistriss Gefferson.

OH non , passer pas vous encore.... Excuse, pardonne , mistriss .... mais voilà mon ami , la brave Belton , que son cœur i saignait devant vous , et vous que l'ame il être généreuse , i va donner consolation pour lui.

BELTON.

Ah! mistriss ! pouvez-vous , en changeant ainsi à mon égard , vouloir me désespérer.

Mistriss GEFFERSON, se retirant toujours

Permettez-moi , messieurs ....

STRAFFORD l'arrestant encore.

Ecoute , mistriss ; vous sauver ! vous pas vouloir parler pour nous..... Oh! besoin parler , quand faire la peine pour le monde , l'explication de la bouche il soulageait le cœur.

Mistriss GEFFERSON.

Messieurs , une mère a ses raisons qui la déterminent,

BELTON.

Des raisons ! ....

STRAFFORD, à Belton

Taisez-toi ; moi va dire meilleur encore . . .. Non mistriss , la raison il être pas ici .... Belton il être ein bon parti pour miss Charlotte : il aimer pour elle , il être aimé encore . j'osais dire parce qu'il être véritable et honnête , et que vous-même déjà il avait consenti honorablement , ... A st'heure , eine fantaisie il faire décider vous l'autrement ! .... mais vous va convenir qu'il pouvait pas être , et vous va retourner avec nous.

Mistriss GEFFERSON.

Je croyais , messieurs , n'avoir pas de compte à rendre de mes sentimens , et je m'étonne que vous m'en demandiez.

STRAFFORD.

Bien contraire , c'est nous qui rendaient à vous. Voir d'abord la signature de ce billet-là.

( Il lui montre le billet de Valcour. )

Mistriss GEFFERSON, regardant.

Je vois , Valcour.

STRAFFORD.

Vous connaître bien l'écriture ?

Mistris GEFFERSON.

Oui , il me paraît que c'est la sienne véritablement.

STRAFFORD.

Lire donc vous à présent ici.

( Il lui montre , en cachant le reste. )

Mistriss GEFFERSON, lit haut.

Je sens que je ne dois pas disputer à Belton let » cœur de miss Charlotte , sur-tout puisqu'elle l'aime , » et je la lui cède. VALCOUR. »

( Elle dit avec étonnement et confusion :)

Cela est positif.

STRAFFORD, vivement et avec ame.

Eh bien , ma chère mistriss ! nous chacune oublier la rancune , et revenir comme il était avant. Monsieur Valcour il être généreux et raisonable ; il voulait pas troubler eine inclination réciproque; vous montrer brave aussi , et consentir pour faire la bonheur de deux amans , que vous il avait déjà approuvé son tendresse.

BELTON.

Ah mistriss ! ne me rendez pas le plus malheureux des hommes ! .

Mistris GEFFERSON, à part.

Voilà qui me confond , et je n'ai rien à répondre.

( Haut )

Messieurs , je suis honteuse avec vous ; mais je dois tout vous dire . La demande de Belton ne trouverait aucune opposition de ma part ; mais je ne suis pas maîtresse .... mon fils aîné , sir Henri , est plus maître que moi , et il a déclaré qu'il n'accorderait sa sœur qu'à celui qui lui ferait avoir un poste qu'il ambitionne , celui de secrétaire du bureau de la marine.

BELTON, vivement.

Oh bien , je taupe très-volontiers à cette condition ; j'ai un ami intime qui a toute la confiance du ministre.

STRAFFORD.

Et moi , je connaître beaucoup la première commis du bureau , et je vas parler avec. Allons-nous ensemble. Mistriss , la poste il être sûr pour sir henri et quand nous il reviendra aussi , miss Charlotte il être pour mon ami Belton.

( Il le prend sous le bras , et ils sortent tous deux. )


SCENE XII.

Mistriss GEFFERSON, seule.

JE ne conçois pas comment Valcour , après l'empressement qu'il m'a témoigné , peut se dédire ainsi ; son procédé m'offense , et je veux m'expliquer avec lui.

(Elle va sonner à la porte de Valcour ; un nègre parait , elle lui dit :)

Je demande monsieur de Valcour.

( Le nègre rentre, elle redescend. )


SCENE XIII.

Mistriss GEFFERSON , VALCOUR sort de chez lui.

VALCOUR, venant à elle d'un air embarrassé et agité.

AH! mistris, que je suis confus de la peine que vous prenez ! ....

Mistriss GEFFERSON, gravement.

On m'a dit , monsieur , que vous renonciez à la main de ma fille , pour la céder à Belton ; j'ai voulu savoir de vous-même si c'était la vérité.

VALCOUR, faisant effort pour cacher les mouvemens qui l'agitent , dit enfin avec peine :

Oui , madame.

Mistriss GEFFERSON, avec dépit, mais toujours gravement.

Peut- on apprendre les motifs qui vous font mépriser notre alliance après l'avoir recherchée ?

VALCOUR, vivement.

Moila mépriser ! ... Oh ! ma chère mistriss , nevoyez , je vous prie, rien d'offensant pour vous dans un procédé que la délicatesse et l'honneur m'ont prescrit. Instruit que l'aimable Charlotte me préfère Belton , j'ai cru ne devoir pas abuser de votre autorité pour contraindre son coeur ; mais j'ai imaginé un moyen de conciliation . Comme , malgré sa beauté , c'était moins un amour décidé pour elle , que le desir de m'allier à votre famille , qui me la faisait rechercher ; comme d'ailleurs , sa sœur cadette , miss Henriette ne lui est pas inférieure en attraits et en qualités estimables , j'ai pensé que je pourrais accorder ma satisfaction avec la justice , en vous demandant la permission de lui reportermon hommage. L'alliance qui fait l'objet de mes vœux aura lieu tout de même , et vos deux demoiselles seront pourvues - à- la fois .

Mistriss GEFFERSON, lui tendant la main qu'il baise.

Cette explication raisonnable me raccommode avec vous ; venez donc , je vais vous présenter à miss Henriette , et je ferai agréer à mon fils les motifs de ce changement.

( Elle rentre chez elle avec Valcour. )


SCENE XIV.

STRAFFORD , BELTON revenant de dehors

BELTON, avec humeur.

ENCORE un obstacle , et une affaire de manquée !

STRAFFORD.

Oh oui ! la première commis il a dit pour moi que le brévet il être expédié depuis eine heure seulement.

BELTON.

Si du moins il avait voulu nous dire à qui .... en faisant des démarches et des sacrifices , peut-être .... mais il s'est obstiné à nous le cacher.

STRAFFORD.

Il faut aller lire toutes les papiers publics , et là sûrement , nous va apprendre bientôt ...


SCÈNE XV.

LES MEMES , FIJEAC sort de chez Valcour avec un paquet de papier,

FIJEAC , vivement à eux.

AH sandis , messieurs , pourriez- bous mé donner des noubelles dé mossu dé Balcour,

BELTON, froidement.

Nous ne l'avons pas vu.

FIJEAC.

Où diavlé s'amuse-t-i donc à la vagatelle , tandis qué lé ministre i ne s'occupe qué dé lui , et qué boilà un paquet dé la plus grande conséquence qu'il bient dé lui expédier.

STRAFFORD, avec intérest.

Cet paquet , dites- vous , ils viendre du ministre?

FIJEAC.

Eh cadédis dé lui-même ... et boilà vien le timbre : ministère dé la marine.

STRAFFORD, bas à Belton qu'il pousse.

Belton , ministère de la marine ! ....

( A Fijeac )

Eh I devine-vous bien-à-peuprès ce qu'il peut être là ?

FIJEAC.

Sandis , il est sûrément lé vrébet d'un emploi majur qué mossu dé Balcour il a sollicité ; et , comme lé ministre il n'a rien à réfuser à son mérite trascendant , il lé lui a accordé suvitément,

BELTON, à Fijeac,

Et encore, vous doutez-vous quel est cet emploi ?

FIJEAC , d'un ton de prétention ridicule.

Eh donc il est simplément lé sécrétariat dé la marine , rien qué ça.

BELTON, s'écrie à part avec douleur.

Oh ciel ! je suis perdu !

STRAFFORD, bas à Belton.

Au contraire , tu es sauvé ; je répondre pour toi de la place ; cours bien vite retrouver l'ami qu'il devait solliciter pour toi , dire lui qu'il demande à st'heure et j'assure à toi qu'il va avoir.

BELTON, bas.

Cela est impossible , puisque Valcour l'à .

STRAFFORD, bas.

Il pouvait pas avoir lui,

BELTON, bas.

Mais ...

STRAFFORD, bas , et le poussant.

Non , pas de mais ; parte tout de suite ; je répondre de tout.... aller vite.

( Belton sort. )


SCENE XVI.

STRAFFORD , FIJEAC.

STRAFFORD, allant à la table écrire.

MON ami, quand vous va remettre cet paquet à monsieur Valcour, je prier vous pour lui donner aussi ein billet que j'écrire là

FIJEAC.

Bolontiers , mossu , jé bous férai cé pétit plaisir.

(Apart part ,, pendant que Strafford écrit . )

Si je croyais qu'il fût chez mistriss , j'y bolérais pour lui donner plus bîte la satisfaction dé cette vonne noubelle ; ... mais s'il n'y est pas , il peut rébénir tandis qué j'y sérai moi , et jé né beux pas lé manquer: il baut mieux lé guetter ici d'arrache-pied.

STRAFFORD, se lève , et lui donne le billet qu'il a cacheté avec un pain.

Tenez , et gardez bien de l'oublier : il être fort intéressant encore.

( Il rentre chez lui. )


SCENE XVII.

FIJEAC, seul.

SANDIS! quel grand intérêt y peut-il y avoir dans un petit chiffon pareil? i n'est sûrement pas un autre vrébet ... Ah ! peut-être quelqu'affaire abantageuse qu'il lui annonce.... ( Il regarde le billet. Il est vien cachété Naturellément , ié né suis pas curieux ; mais jé n'aime pas qu'on mé fasse dé mistère .... Si cế n'était la discrétion , pourtant , jé saurais vientôt tout lé sécret : car lé pétit pain il est encore tour frais , et jé pourrais facilément lé souléber ... Jé fais réflession qué lé mossu il abait une singulière mine en écribant cé poulet ; qu'il abait même chuchotté tout vas abec l'autre qu'il est parti ! Qué diavle cé pourrait- il être ?...

( I retourne le billet en tous sens et l'entr'ouvre un peu. )

Il est trop vien fermé ; jé n'y bois rien ... Ehsandis, i n'en coûte pas dabantage dé sé contenter ; jé lé réfermérai toujours vien.

( Ill'ouvre. )

Ah ! cadédis , je suis pris ; boila mon maître. ( Il se retourne pour refermer le billet.


SCENE XVIII.

FIJEAC VALCOUR sort de chez mistriss , d'un air content.

VALCOUR, à lui-même.

ENFIN , c'est arrangé ; la mère est satisfaite , et je serai du moins tranquille de ce côté-là avec ce monsieur Strafford.

FIJEAC , allant à lui.

Mossu , je suis enchanté de bous boir en si velle humeur, et jé bais encore l'augmenter. Tandis qué bous étiez chez la veauté , la fortune et la gloire y sont benues bous chercher ici, Boilà un paquet dé la part du ministre.

VALCOUR, vivement.

Ah! donne.

( Ille décachette et le parcourt , pendant que Fijeac, en se retournant , achève de bien refermer le billet. )

( Avec joie. )

Dieu soit loué ! voilà que tout commence à me réussir à souhait .

( Haut. )

Mon cher ami , c'est le brévet du secrétariat que j'avais demandé , et je vais le porter sur- le- champ à mistriss Gefferson pour son fils.

FIJEAC, l'arrestant.

Un petit moment , mossu ; une vonne noubelle i né bient jamais sule. J'ai encore ici un autre villet à bous remettre , qué l'on dit trés-intéressant.

VALCOUR , vivement.

Du ministre aussi ?

FIJEAC.

Non-pas , i né bient pas dé la même main. Lé boici,

( Il lui donne en appuyant encore la main sur le cachet. )

VALCOUR, avec une forte émotion en voyant l'adresse..

C'est de l'écriture de Strafford ! ....

( Il s'éloigne un peu, l'ouvre vite et lit bas ; puis il s'écrie. )

Ciel ! .... Il se jette dans unfauteuil et laisse tomber le billet. )

FIJEAC, à part.

Eh quel diavle d'intérêt qu'il a donc mis dans cé villet dé quatre lignes ! .... ( Il voit que Valcour reste anéanti : il ramasse le billet avec précaution , le tirant d'abord avce le pied , et lit à demi-voix. ) « Bous faire toujours soubenir moi que bous il » être vivant ; bous abez ovtenu un emploi que mon » ami Velton sollicitait. Soubenez-bous donc bous- » même qu'il ne poubait pas être accordé à un homme » qu'il être mort ». Quel peste de varvouillage ! et qué céla i beut- ti dire.

VALCOUR, revenant un peu à lui.

O Dieu qu'elle situation terrible ! ....

FIJEAC.

Eh ! quest-ce donc ça , mossu , qui dit qué bous êtes mort.... et qué bous en faites vien aussi lé semblant bous-même.

VALCOUR, se relevant furieux.

Oui , mon ami , je le suis, et c'est Strafford qui m'a tué,

FIJEAC, étourdi.

Allons , boilà vien une autre histoire à cette hure! Est- cé qué les gens qui sont tués i marchent et parlent comme bous faites ?

(Apart, avec une réflexion presque comique. )

Ah! sandis , jé m'abise moi .... c'est qué peut- être il y a dé la poudre empoisonnée dans cé maudit villet , et qu'il a trouvlé la cervelle dé mon paubre maître ! .... Miséricorde ! qué jé lé jette bîte , qué jé sens déjà ma téte qui sé détraque aussi !

( Il rejette le billet. )

VALCOUR‚ à lui-même, avec une réflexionforte et douloureuse.

Céderai-je encore cette fois .... et dois-je en effet me regarder comme mort pour lui ?

FIJEAC.

Eh ! mais non , mossu ; ié bous garantis tout aussi bibant qué moi ..... et botre bisage i promet encore dé la santé pour plus d'un demi-siècle. Laisse-moi. Je te dis que Strafford m'a tué.

VALCOUR , s'égarant encore.

Céderai-je encore cette fois .... et dois-je en effet me regarder comme mort pour lui ?

FIJEAC , avec impatience.

Mais cadédis , bous me feriez débénir fou .... sinon qué bous l'abez rêbé ..... Dé quelle maniére donc qu'il hous aurait tué , puisqué vous mé le dites ? ...

VALCOUR, avec une fureur concentrée.

Je l'ai provoqué au combat.....

FIJEAC.

Eh vien , lé comvat i n'a pas été murtrier ; car , Dieu merch, bous n'êtes vlessés ni l'un ni l'autre.

VALCOUR , lui serrant le bras fortement.

Si fait ;je suis mort.

FIJEAC , criant et secouant son bras.

Oh! non , dé par tous les diavles ! Jé lé sens vien , et jé bous en réponds..... , Mais expliquez-moi donc ce logogrife , je bous en prie.

VALCOUR, d'un ton farouche et vivement.

Sous prétexte qu'il était plus fort que moi aux armes , il m'a proposé de tirer au sort à qui aurait le pistolet pour tuer l'autre. Dans ma fureur , je l'ai accepté. Nous avons joué aux dez ; il a gagné le pistolet , et ma vie est maintenant à sa disposition.

FIJEAC , s'écriant.

Ah! Satanas ! quel diavle dé jeu enragé qué bous abez joué-là ! ... Mais , mon cher maître , je pense une chose , iéquel est-ce qui a fourni les dez ?

VALCOUR

C'est Strafford.

FIJEAC , s'écriant comiquement.

Eh vien , mossu , iz étaient pipés.

VALCOUR.

Oh ! c'est un homme d'honneur ; il est incapable de cette infamie.

FIJEAC.

Eh, sandis ! on a fait cette fripponnérie à des parties de bien moins de conséquence.

VALCOUR, après une réflexion , à lui-même.

Oui , je le dois à mon honneur ; je lui cède encore cette fois. Je vais renvoyer le brévet avec mon désistement.....

( Avec force et colère concentrée. )

Mais c'est bien le dernier sacrifice que je lui ferai.

( Brusquement à Fijeac. )

Va dire à Strafford qu'il sera satisfait,

( Il ramasse le billet , et retourne chez lui. )

FIJEAC.

Il suffit , mossu.....

(Par réflexion , il court à lui. )

/ Eh , dites-moi donc encore , est- cé-ti au plus haut point qué bous abez joué ?

VALCOUR , déjà sur sa porte.

Oui , et il a amené 18.

( Il rentre chez lui. )


SCENE XIX.

FIJEAC , seul , s'écriant vivement.

18! raffle dé six ! .... Quand jé lé disais ... Certes, jé lé gagérais qué cé mossu l'Anglais il est un escamoteur , et qué ses dez i né sont pas dé von alloi ... Comment diavle m'y prendrai-je-ti pour bérifier lé fait ? Il rêve. ) Raffle dé six ah ! sandis , il est von comme ça ! Jé lé tiens , et jé bas rétirer l'enjeu dé mon paubre maître , et lé ressusciter....... Il faut qué jé lé défie à mon tour..... Mais déssous quel préteste ? I ne boudra pas sé mésurer abec un domestique.

( Il rêve encore. )

Oh! j'y suis . Pour lé coup , il né pourra pas s'en défendre. J'ai fort hurusément aussi des dez dessus moi.

( Il les tire de sa poche , et les roule sur la table. )

Ils sont braves ; mais j'ai remarqué qu'ils tournent plus bolontiers , au petits points , et jé bais lé prendre par lé moyen des conditions qué jé bas écrire là d'abance.

(IL dit en écrivant )

« Lé plus vas point il aura lé pistolet »... Ah! mossu dé la raffle dé six , j'espére qué bous allez y être pris dé cette fois.

( Il écrit encore un peu; puis il ploie le papier, et vafrapper à la porte de Strafford. )


SCENE XX.

FIJEAC , STRAFORD sort de chez lui.

FIJEAC, d'un ton important.

Mossu, j'ai remis bostre villet à monsieur dé Balcour, il la lu attentibément , et il m'a prié dé bous dire qué bous seriez satisfait , et qu'il allait renboyer le vrébet.

STRAFFORD.

Très-bien , je suis content. Adieu , mon garçon.

(Il va pour rentrer chez lui. )

FIJEAC, l'arrête.

Adieu , mon garçon ! .... Ah ! si bous êtes content dé mossu dé Balcour , moi jé né lé suis pas dé bous ... Quest-cé qué c'est qué des garçons ! ..... un terme dé mépris céla ! .... Déjà tantôt qué bous il est abez pris cette familiarité abec moi ; j'abais cette insulte sur le cur ! .... et maintenant jé bous démande raison dé la récidibe.

STRAFFORD.

Eh ! qu'est-ce que vous il demande moi ? est- ce que vous n'être pas valet de Valcour ?

FIJEAC, jouant la colère de l'orgueil.

Qu'appellez-bous , balet ! ... sandis , apprénez qué jé suis le goubernur et l'ami de mossu dé Balcour ; qué la race des Fijeac dé Craquignac dont cé qué j'ai l'honnur d'en être issu, est une des plus anciennes et des plus novles dé la Garonne , et que je suis gentilzhomme en droite ligne , et dé père en fils , jusqu'à la dernière génération.

STRAFFORD, bonnement.

Excuse-moi donc , je connaissais pas encore votre noblesse.

FIJEAC.

Eh donc , jé bous la déclare et bous la manifeste ... et maintenant qué bous la connaissez tout aussi vien que moi , vous debez croire qu'un novle dé ma trempe i né sé contente pas abec des excuses bervales.

STRAFFORD.

Qu'est-ce que vous il exigeait donc de plis encore ?

FIJEAC, faisant de l'embarras.

J'esige , monsieur , qué la pointe dé la lame il en découse par une et deux ....

(Il fait le geste de tirer une botte. )

Ou qué lé canon du pistolet il emporte abec une valle la trace dé l'insulte dont cé qué bous m'abez déshonoré..... En un mot , jé vous défje.... Et , comme je suis tout aussi vrabe qué monsieur de Balcour, jé bous joue lé même jeu qué lui.

STRAFFORD.

Comment , monsieur le gouverneur , vous vouloir forcer moi pour tuer vous aussi.

FIJEAC.

Oh ! jé dis , mé tuer ! .... I n'est pas encore décidé comme quoi que la chance y tournéra…….. Mais , à tout hasard , jé beux bous prouber qué la bie i né m'est rien qu'un fétu au régard de l'éclat dé ma réputation et dé ma novlesse.

STRAFFORD.

Eh bien , monsieur , puisque vous voulez , il faut contenter pour vous. Je reviendre toute suite.

(Il rentre chez lui. )


SCENE XXI.

FIJEAC , seul.

ALLONS , cadédis , le sort il est jeté , Jé né beux faire aucun mal à ce homme ; mais jé beux lui rayattre son orgueil , et délibrer mon paubre maître des griffes dé son pistolet.


SCÈNE XXII.

FIJEAC , STRAFFORD revient avec , le pistolet les dez , les cartes et la bourse de guinées ; il met le tout sur la table.

STRAFFORD.

ALLONS , choisir vous , monsieur gentilhomme la Garonne.

FIJEAC

Jé bous ai dit qué jé suis aussi hasardeux qué monsieur dé Balcour, et jé m'en tiens aux dez comme lui.

(Il regarde la bourse pleine de guinées. )

Qu'est-cé qué c'est-ti qué cette vourse , où cé qué jé bois dé l'or dédans ? Est- elle dé la partie ?

STRAFFORD.

Non, monsieur ; il est des guinées pour prendre dedans chacune , au cas que vous voulez jouer pair ou non.

FIJEAC.

Oh bien , non ; comme ié bous ai dit , jé mé fisque sur les dez..... Et il est d'autant plus commode , qué bous abez les bôtres , et moi j'ai les miens ; chacun í sé serbira dé ses propres armes.

STRAFFORD.

Tout comme il plaira à vous. Tirer , monsieur ; je cède la primauté.

( Îl lui donne le cornet. )

FIJEAC.

Bon ! j'accette la politesse ..... Boilà un papier qué jé bous rémets , où cé qué les conditions dé notre comvat i sont expliquées.... Mais bous né lé lirez qu'après lé tirage.

STRAFFORD.

Soit ; je consentais encore tout de même. Roulez , monsieur.

FIJEAC , mettant ses dez dans le cornet,

Lé pistolet il est-i vien chargé ?

STRAFFORD.

Trois balles dedans , et double amorce.

FIJEAC, remuant les dez dans le cornet.

Sandis il est un joli passeport pour lé perdant, "

( Il jette les dez. )

comptez , mossu , boilà jouez à présent abec les bôtres , et laissez les miens sur la tavle , pour serbir dé témoins.

( Il lui donne le cornet. )

STRAFFORD , mettant ses dez dedans.

Très-volontiers. Ils témoignent que vous n'avez pas beau jeu ; et même , j'acquitte vous encore , si vous voulez.

FIJEAC, triomphant.

Oh! nenni pas , sandis ! je l'ai plus veau qué bous pensez.. Jouez toujours , et lé papier après i bous dira le reste , mossu dé la raffle dé six .... né ....

STRAFFORD, remuant le cornet.

Pourquoi pas ? toutes les points , il être dans le jeu.... Tenez , monsieur.

( H jette les dez. )

FIJEAC, regarde , et s'écrie au désespoir.

Trois as ! ... ahlé magicien d'homme .. sorcier abec ses raffles 1

STRAFFORD, tranquillement.

il est Certes , j'avais perdu avec ein belle espérance ! .. Voyons donc la papier.

( Il le prend et l'ouvre. )

FIJEAC, frappant des pieds et des mains .

Oui, perdu 1. ... Faut-i pas qué lé diavle i s'en mêle .

STRAFFORD, lit haut

« Le plus bas point il aura le pistolet » . Oh ! gaddem ! il être bien différent à st'heure ; il m'appartient donc.....

(Il le prend. )

Eh bien , monsieur la noble jusqu'à dernière génération !. vous il y être arrivé toute suite , et voilà votre noblesse il être éteint tout-à-l'heure. Allons, dépêcher nous. être-vous prête ? Il lui présente le pistolet.

FIJEAC, recule effrayé , en s'écriant

Eh ! non , eh ! non ; pas encore .... Sandis ! bous êtes donc plus pressé abec moi qu'abec mossu dé Balcour ?... Lisez cé qué j'ai ajouté au vas,

STRAFFORD , lit haut.

« Le perdant sera à la disposition du vainqueur ; mais il aura vingt-quatre heures pour mettre ordre à affaires ».

FIJEAC, vivement.

Oui , mossu , c'est-là ma condition espresse , et sine quâ non ; et jé bous réponds qué jé profitérai vien du terme dé répit.

STRAFFORD, ramassant toutes ses affaires qu'il met tranquillement dans ses poches.

C'est bien , monsieur , je donnais à vous les vingtquatre heures ; mais après manquer pas vous pour revenir , et les trois balles qu'il être ici ,

( Montrant le pistolet. )

i va changer place , et moi loger là-dedans la tête d'un gentilhomme.... Pon adieu la génération... Hondyedouser....

( A part. )

A st'heure je m'en vais faire mon visite pour ma chère miss Henriette.

( Il va chez mistriss Gefferson , et, quand il est à lala porte , il se retourne , montre le pistolet à Fijeac, en lui disant. )

Poun ! ...

( Il rentre. )


SCENE XXIII.

FIJEAC , seul.

Οui , poun !... compte là-dessus.... Sandis ! jé né té laissérai pas lé tems dedé faire cé beau pon-là ..... et jé t'en réponds....

( Il se jette dans le fauteuil. )

Ah ! la malhuruse inbention que j'ai eue-là


SCENE, XXIV.

FIJEAC, dans le fauteuil VALCOUR, sort de chez lui avec un papier à la main.

VALCOUR, dès sa porté.

TIENS , va porter cela au bureau de la marine.

( Fijeac ne répond pas. Il avance à lui . )

Eh bien ! que fais-tu donc là ?

FIJEAC , piteusement , sans bouger.

Hélas ! mossu , je suis mort.

VALCOUR.

Comment mort ! ...

FIJEAC , sans se lever.

Oui , mossu , ni plus ni moins qué bous . Bostre diavle d'Anglais , il est un magicien qu'il a toutes les raffles à son commandement.

VALCOUR.

Je ne te comprends pas.

FIJEAC , toujours assis:

Ni moi non plus ; car ça béritablement, i mé passe ! .. Imaginez-bous , mon cher maître , qué pour bous délibrer du maudit pistolet , j'ai cherché à lé régagner à cet homme , qu'il est vien , jé crois , possédé.... Mais , pour lé surprendre , j'abais espécifié dans un écrit qué lé plus vas point i gagnerait.... et j'avais des dez qué jé pensais vien dé pouboir m'y fier déssus..... Effettibément , j'amène quatre, et jé croyais déjà vien ma bie et la bostre en sûreté... lorsqué cé diavle dé sorcier il jette les siens , et i m'emporte lé pistolet par une raffle d'as....

VALCOUR.

Eh bien , mon ami ! mon brave Fijeać ! je te remercie de ce beau trait de dévouement pour moi......... Mais à présent il faut te résigner comme j'ai fait.

FIJEAC , se relevant vivement , s'écie.

Non , cadédis ! qué jé né mé résigne pas ! ... Hurusément que j'abais eu la sage précaution d'espécifier aussi bingt- quatre hures dé répit entre la sentence et l'exécution , et j'en vas profiter pour mé mettre déhors dé la portée dé son maudit pistolet carabiné..... Il y a justément en rade un nabire qui doit partir cette nuit à la marée montante , et jé bas mé serbir dé l'occasion,

VALCOUR,

Comment ! tu veux t'en aller ?.

FIJEAC.

Oui , certes , qué jé lé beux. J'aime mieux faire un pétit boyage qu'un grand . et jé bous inbite trèsfort à faire de même ..... sinon , ayez pour agréavle , mon cher maître , qué ié vous prie dé bous ressoubénir des pétits gages qué bous me rédébez , et dé bouloir vien mé les solder , pour qué jé puisse mé payer mon passage.

VALCOUR.

Cela est juste. Quand tu auras porté ce paquet-là , je te ferai ton compte , et je te donnerai en outre des témoignages de ma reconnaissance.


SCENE XXV.

LES MÊMES , STRAFFORD sort en colère de chez mistriss Gefferson.

STRAFFORD , à lui- même , sans les voir.

OH! pour celle- là , il va être trop fort , assurément !... Il vouloir prendre à présent mon maîtresse ! ..... Oh ! nous va voir ! …….

( Il avance , et voit Valcour et Fijeas. Il tire son pistolet. A Valcour, )

Ah ! vous voilà ! ... Eh bien , monsieur , être vous prêt cette fois ? VALCOUR, d'un ton brusque et ferme. Oui , monsieur , débarrassez-moi.

FIJEAC , tremblant.

Eh ! mossu , soubenez-bous donc qué j'ai bingt-quatre hures.

STRAFFORD , avec un gestefort et de mépris.

Décamper toi , lâche.

FIJEAC , partant vite.

I n'y a pas de lâcheté , mossu ; j'osserbe les conditions.

( Il rentre chez Valcour. )


SCENE XXVI.

VALCOUR, STRAFEORD.

STRAFFORD, avec flegme , mais dépit.

ECOUTE-MOI ,, vous VO , brave monsieur Valcour , er juger vous-même. Suivant notre convention aussi , vous il être bien mort avec moi ... Je devais croire du moins ... Pourtant mistriss Gefferson , à st'heure , il viendre dire pour moi que vous il demandait pour mariage miss Henriette , son fille , que j'aimais moi depuis long-tems , et qu'il allait donner pour vous .... Ainsi vous voir que je trouve toujours vous par-tout pour faire enrager moi dans mes affaires , dans mes amis et dans mon maîtresse même ; et comme ça il ne pouvait pas rester plus longtems , décider vous ; voilà encore un article que vous il devait céder moi , la main de miss Henrietté,

VALCOUR, outré,

Oh! morbleu ! monsieur , c'est trop de sacrifices ! et j'aime mieux mourir unefois que d'être continuellement soumis à vos lois tyranniques .

( Plus fort encore. )

Je ne veux plus rien vous céder. J'ai bravé la mort à laquelle j'ai bien voulu m'exposer, en vous provoquant; mais je n'ai pas voulu me rendre votre esclave. Tirez, monsieur.

( Il lui présente sa poitrine. )

STRAFFORD, froidement.

Vous avez du courage et de l'honneur , monsieur , je savais bien ; mais j'ai aussi , moi , et je voulais donner à vous ein revanche.

( Il tire son pistolet en l'air. )

Voilà la pistolet tiré ; je n'avais plis droit sur vous..... Mais voilà ein autre à st'heure ; nous va rejouer pour celle- là . Peutêtre vous il sera plis heureux ; et , si vous gagnez , vous délivre moitoute suite du chagrin de rencontrer toujours vous pour barrer moi.....


SCENE XXVII et dernière.

Au bruit du pistolet tout le monde vient. ) LES MÊMES ; mistriss GEFFERSON sort de chez elle , BELTON rentre de dehors , et FIJEAC sort de chez Valcour.

Mistriss GEFFERSON.

EH! mon Dieu ! qu'est-ce là ?

BELTON, courant à Strafford.

Quest-ce que c'est , mon ami?

FIJEAC, à Valcour.

h sandis il est- ti tout dé bon cette fois ? ...

STRAFFORD, tranquillement.

Il n'être rien encore , attendre ein instant , il va être fini.

( A Valcour. )

Allons , monsieur , nous achever le partie.

VALCOUR, avec noblesse et sentiment.

Non , monsieur , votre conduite loyale a terminé notre querelle ; vous ne m'avez pas vaincu par le courage , et vous me décidez par la générosité. Puisque vous êtes premier en date , la justice obtient de moi ce que jamais la violence n'aurait pu me faire céder. Messieurs , les deux demoiselles Gefferson vous préfèrent tous les deux ; soyez donc heureux ensemble tous les quatre. Voilà le brévet du secrétariat que je vous remets pour sir Henri , et pour servir de gage à votre double union ; je ne vous demande ainsi qu'à madame , que de me regarder dorénavant comme un ami sincère de toute votre famille..

Mistriss GEFFERSON, avec affection.

Vous le méritez , et nous nous en ferons tous honneur.

STRAFFORD , à Belton.

Goddem! il faire rougir moi à st'heure ... mais j'admire et je remercie ...

( A Valcour avec enthousiasme. )

Embrasse pour moi , brave homme ! ....

( Il le serre dans ses bras. )

FIJEAC, se coulant derrière Strafford et son maître.

( A Strafford, )

Dites zun peu , mossu ; en quittant lé pistolet abec mossu dé Balcour, l'abez bous aussi quitté dé déssus moi ?

STRAFFORD, riant.

Oui , oui , mon ami ; à st'heure , toi il pouvait rester vivant tout-à-fait.

FIJEAC.

A la vonne hure ; et je promets vien dé né plus réjouer dé partie si scavreuse !

AU PUBLIC.

Jé crois même qué si l'on aménait la mode dé cé duel là , il pourrait réténir et réfroidir vien des maubaises têtes !


SCENE PREMIÈRE.

STRAFFORD sort de chez lui, à droite , suivi de JACQUES, domestique négre

STRAFFORD

JACQUES , je entrer ici chez mistriss Gefferson ; Belton il doit venir voir moi ; tu feras attendre lui et viendra avertir moi quand il être arrivé.

JACQUES.

Li , bon maître ; toi pas peur , moi va pas manquer.

(Il rentre. )


SCÈNE II.

STRAFFORD va pour entrer chez mistriss àgauche. VALCOUR sort de chez lui , du fond , et arrête Strafford.

VALCOUR, d'en haut

Un mot, s'il vous plaît monsieur

STRAFFORD, se retournant

A moi vous parler ?

VALCOUR.

A vous-même; vous ressouvenez-vous d'avoir été hier au soir à la taverne de Lyoll- Boy?

STRAFFORD.

Oui , bien.

VALCOUR.

Vous ressouvenez-vous, de m'y avoir vu ?

STRAFFORD.

Très-peu.

VALCOUR.

Mais vous devez vous rappeller d'avoir eu une contestation fort vive avec moi?

STRAFFORD.

Point du tout.

VALCOUR.

Cela est surprenant ; une mémoire si courte risque de vous faire du tort.

STRAFFORD.

Pourquoi?

VALCOUR,

C'est qu'on regarde assez souvent comme manque de bravoure, l'oubli d'une dispute vive et qui a été publique.

STRAFFORD.

C'est mal fait ; un honnête homme qui avait raison , il pouvait oublier l'étourderie de celui- là qui avait manqué ; mais l'autre honnête homme qui avait tort , il devait souvenir lui , pour plus avoir encore ein autre fois.

VALCOUR.

Aussi je m'en souviens , monsieur , et je viens pour le réparer.

STRAFFORD.

Alors il être bien fait; j'estime vous davantage , et je pardonne de bon cœur.

( Il lui tend la main.” )

VALCOUR , fièrement.

Je ne veux pas de votre pardon ; c'est une offense que vous me faites à votre tour .... et si je vous ai offensé hier le premier , la réparation que je viens vous faire , c'est de vous proposer de me couper la gorge , ou de me brûler la cervelle avec vous.

STRAFFORD.

Charmante réparation ! ....

VALCOUR.

C'est la seule entre gens d'honneur.

STRAFFORD.

Très-bien il veut dire que , pour réparer l'offense que vous convenez avoir fait à moi hier , vous venez bonnement m'offrir de tuer moi aujourd'hui !

VALCOUR.

Oui , monsieur, ou vous donner l'occasion de me tuer moi-même.

STRAFFORD.

L'occasion il être fort agréable assurément ; mais , mon cher monsieur , il tenter pas moi di tout.

VALCOUR, dédaigneusement.

Je vous entends : c'est-à dire que vous aimez mieux être deshonoré , et que vous consentez que je publie par-tout que vous êtes un lâche.

STRAFFORD, vivement,

Point du tout ; je deffendre bien au contraire.

VALCOUR,

Hé bien donc , pour m'en empêcher , il n'est qu'un moyen; c'est de vous battre avec moi.

STRAFFORD, à part.

Quel diable d'homme ! il être enragé pour courir à son mort ! ....

(Haut. )

Vous vouloir donc absolument tout-à-fait , monsieur?

VALCOUR.

Oh! très -absolument ; ou vous allez sortir avec moi pour soutenir votre honneur , ou je sors tout seul , pour aller déclarer par-tout que vous n'en avez pas.

STRAFFORD , piqué , mais avec une colère froide.

Gaddem ! il être trop fort celui-là ! .... La vie il être certainement beaucoup .... mais la honneur il être encore plis davantage , et vous va connaître qu'il rester encor la- dedans.

( Il se touche le cœur. )

VALCOUR impatienté.

Eh ! c'est ce que je deinande ; marchons , monsieur.

STRAFFORD, l'arrestant.

Ecoute ein instant. Je comprendre à stheure véritablement que , pour sauver l'honneur à nous deux , il faut qu'une il perde la vie , et je consentir tout de bon ; mais j'être bien-aise d'avertir vous que , si j'aimais pas à battre moi , il n'être pas poltronnerie , ... il être prudence. Monsieur jeune homme.... informevous de Strafford ....à l'épée d'abord , je n'avais pas ma pareil , ni sur la sabre non plis ... et pour la pistolet , à cinquante pas , je moucher ein chandelle , ou je couper ein balle sur la lame de couteau ..... et si je batte avec ces avantages , je deviendre ein assassin ! la loi même il avait deffendu pour moi.

VALCOUR.

Eh bien , monsieur , je vous relève de cette loi-là , Et je vas vous signer d'avance que je vous pardonne ma mort,

STRAFFORD.

Très-bien , monsieur ; vous il être brave beaucoup ! ... mais moi , je serais pas si je profitais. Ecoute donc bien mon condition pour égaliser le sort des armes , sans quoi je batte pas.

VALCOUR

Oh ! que de détours ! dites-la donc vite , cette condition ; car je commence à mal augurer de vous.

STRAFFORD.

Presser pas vous encore tant ; vous verra bientôt. Réfléchir seulement un peu , et dire- moi si vous pense bien sérieusement que notre honneur il voulait qu'un de nous deux il meure.

VALCOUR, vivement et avec humeur.

Eh morbleu oui , monsieur , c'est obligé , et cela devrait être déjà fait.

STRAFFORD , toujours froidement , mais fermement.

Bon il va pas tarder non plis , et mon manière il étre bien aisée et bien sûre . Attendre-moi là deux minutes.

(Il rentre chez lui. )


SCÈNE III.

VALCOUR, seul.

AH monsieur l'Anglais , malgré votre sang-froid et votre fermeté affectée , vous m'avez bien l'air de n'être pas dangereux.....

( Il se promène. )


SCENE IV.

VALCOUR, STRAFFORD revient de chez lui.

STRAFFORD, plus lestement,

DONNE la main , mon brave ; vous va être content toute suite. Voilà ein bon pistolet carabiné et portant bien ses trois balles. Il être bien chargé , bien amorcé , avec ein bonne pierre d'agate bien préparée ..... Jamais il avait pas ratté encore . pour..avancée. et je garantis

(Il le pose surla table qu'il a un peu)

VALCOUR.

Eh bien où est l'autre pareil ?

STRAFFORD,

Non , il faut pas davantage qu'une. Quand on se batte avec deux , chacune la sienne , on se manquait , on rechargeait , on recommençait , et les témoins ils arranger pour vous et réconcilier ,,, .... et on paraître brave à trop bon marché..... Ici , tout ça il n'être pas de même. Voilà le pistolet toute prête entre nous deux..... Nous i va jouer pair ou non...

VALCOUR, surpris,

Comment! jouer !

STRAFFORD,

Oui , monsieur , quand on être décidé , la vie il n'être plis rien qu'un jeu,,... Ou bien , nous va jetter les dez au plis haut point , ou avec les cartes .... comme vous voulez. , .. , Celle- là qui va gagner prendre la pistoler, et il espédier l'autre à son volonté.

(Il prend un siége , et s'assied devant la table. )

VALCOUR, un peu ému.

Oh oh ! vous avez-là une singulière façon....

STRAFFORD, avec sang froid.

Singulière , si vous trouvez ; mais il être bien sûre... Et puisque vous il être décidé , il n'y il n'y avait pas la meilleure et la plis honnête ; personne il avait l'avantage... Allons , monsieur , voilà les dez , ou voilà des guinées ou voilà des cartes.....

(Il met tout cela sur la table avec un cornet pour les dez. )

Choisir vous-même à-présent le jeu qu'il conviendra mieux pour vous

( Durement. )

Ou bien , je dire , moi , à mon tour , que vous il être un lâche , et que vous il avait peur pour mourir,

VALCOUR, affecté.

Moi , peur ! allons , monsieur , je suis décidé , et voilà votre dernier moment , ou le mien. Je prends les dez.

(Il remue le cornet. )

Le plut haut point aura le pistolet,

STRAFFORD.

Bon , je suis content ; roulez.

( Valcour jette les der sur la table. )

Il y a 15 ; vous avez beau jeu. A moi à- présent. Mette les dez vous-même.

( Il les remue ensui et les jette. )

18. La pistolet il être à moi.

( Il le prend. )

VALCOUR, fermement.

Eh bien , monsieur , servez-vous - en.

( Il se présente. )

Mais ne vous flattez pas que j'aie peur. Tirez.

STRAFFORD.

Ah! vous il être donc toute prête pour mourir ?.

VALCOUR,

Oui , monsieur.

STRAFFORD.

Oh bien ! moi , j'être pas encore en disposition pour tuer ; mais il être tout de même. Pensez que vous il être mort. Allez faire votre affaire encore , je permettais à vous. Voilà assez à st'heure pour contenir votre vivacité. Vous être brave et honnête ; mais souviendre-vous bien que la pistolet il être à moi , et que je regarder vous comme mort. Adieu , monsieur.

( Il ramasse toutes ses affaires avec sang-froid, et rentre chez lui. )


SCENE V.

VALCOUR , seul , et interdit.

Je suis confondu de cette aventure .. et me voilà dans une situation indéfinissable ! ... Cet homme est maître de ma vie , et il me la laisse ... .. J'aimerais autant , je préférerais même qu'il me l'eût ôtée dans le moment d'effervescence ... je serais quitte de tout ... au lieu que l'obligation que je lui ai me pèse et m'humilie..... Mais enfin , puisqu'il me laisse vivre , profi- tons de son honnêteté . et allons réfléchir sur ma position.

(Il rentre chez lui , aufond. )


SCÈNE VI.

BELTON , sortant de chez mistriss Gefferson ,avec un air chagrin.

CERTES, je ne m'attendais pas à cette fâcheuse nouvelle, Il faut que j'aille consulter mon ami Strafford , et que je cherche avec lui les moyens de parer ce coup si fatal à mon amour.

( Il va pour entrer chez Strafford.)


SCENE VII.

BELTON, STRAFFORD , sortant de chez lui.

STRAFFORD , affectueusement.

AH! mon cher Belton , j'attendais pour toi. Tu as bien tardé pour venir.

BELTON.

Hélas ! mon ami , tu me vois au désespoir. Je sors de chez mistriss Gefferson , où j'avais été pour saluer ma chère miss Charlotte. Je l'ai trouvée dans la dernière affliction ; et elle m'a appris que sa mère lui avait ordonné de se préparer à épouser un homme qui l'a éblouie par ses richesses , et sur- tout par la faveur dont il s'est vanté de jouir auprès du ministre.

STRAFFORD , avec chagrin.

Comment toi i ne serait pas mon beau - frère ! .... Oh si fait. Je voulais épouser moi miss Henriette Gefferson , et je voulais encore que toi il épouse son sœur , miss Charlotte .... Attendre ein peu , j'allais toute suite faire entendre raison pour son mère ... Mais dire moi encore , qui donc il être cette rival qui voulait supplanter toi ?

BELTON.

C'est un Français qui est ici depuis peu.

STRAFFORD..

Un Français ! ... Et comment il appeller lui ?

BELTON.

Miss Charlotte m'a dit que c'était monsieur Valcour, et qu'il s'est mème venu loger dans cette maison depuis hier.

STRAFFORD, vivement par amitié.

Valcour ! .... Oh bien , prendre courage , et n'avoir plis peur. Valcour il pouvait pas nuire à toi ; il être mort.

BELTON.

Mort ! .. qu'est-ce que tu me dis- là ? Je l'ai vu encore hier au soir , et bien portant.

STRAFFORD.

Hier il était possible .... Mais aujourd'hui , à st'heure , je dire à toi qu'il n'être plis vivant.

BELTON.

Quel conte encore une fois , cela ne se peut pas.

STRAFFORD.

J'assure toi qu'il être véritablement. Toi i va voir bien vite.

( Il écrit à la table)

( Il dit haut en écrivant. )

« Monsieur , un homme » qu'il être mort , il pouvait pas épouser miss Char- » lotte Gefferson , la prétendue de mon ami intime » Belton. J'espère que si vous , il pense être encore » vivant , vous va faire voir que vous il vivre avec » honneur».

STRAFFORD.

(Il ploie la lettre , se lève , et la montre à Belton , en lui disant)

Voilà tout.

BELTON.

Eh bien , après ; que vas-tu faire de cette folie-là 1

STRAFFORD.

J'allais envoyer pour lui et toute suite , toi n'avoir plis de rival.

( Il appelle à sa porte . )

Oh ! Jacques¹ .

(Jacques vient)


SCÈNE VIII.

LES PRÉCÉDENS , JACQUES.

JACQUES.

QUI çà maîte , voulet moi ?

STRAFFORD, à Jacques.

Entrer chez monsieur Valcour , donner cette billet là , et porter le réponse.

JACQUES,

Moi couri.

(Il entre chez Valcour )


SCENE IX.

STRAFFORD,BELTON.

STRAFFORD,

TOUT-A-L'HEURE toi va savoir.

BELTON.

Mais je ne te comprends pas...

STRAFFORD.

Il être tout-à-fait clair, miss Charlotte il être pour toi. Viendre avec moi chez mistriss Gefferson ; je vou lais faire ton raccommodement.

BELTON.

Elle est sortie pour aller solliciter une place pour son fils sir Henri.

STRAFFORD.

Eh bien , nous attendre pour elle. Je voulais pas que toi aller avant que la paix il être fait entre vous.

BELTON.

Mais , mon cher , encore une fois tu n'y penses pas.. Tes plaisanteries sont hors de saison. Je t'assures que rien n'est plus sérieux , et que miss Charlotte vient de m'affirmer elle-même que sa mère lui avait expressément défendu de recevoir dorénavant mes visites,

STRAFFORD.

Il prouvait rien du tout ça. La mère il savait pas encore que monsieur Valcour il être mort ; mais quand il va savoir, il pouvait plis penser à donner lui son fille.

BELTON.

En vérité , mon pauvre Strafford , tu m'inquiètes toimême à présent avec tes propos incompréhensibles ! Est-ce que ta raison est dérangée ? Comment tu me dis que Valcour est mort , et tu lui écris ! .... Remarque donc la contradiction .

STRAFFORD.

Il n'y a pas du tout , et toi va convenir avec, Justement, voilà Jacques , écoute son réponse.


SCÈNE X.

LES MÊMES, JACQUES revient de chez Valcour , avec un papier.

STRAFFORD.

EH bien ! Jacques ? ....

JACQUES.

Oh ! maîte à moi , ça monchié-là li fou !

BELTON, à part.

Je ne sais pas si mon pauvre ami est plus raisonnable.

JACQUES.

ah vlà li tourné. Quand li fini miré billet à vous , grands yeux , et ouvri grand bouche , comme pour li va mangé moi.... Après ça , li couri grands pas par tout la chambe , comme pour sauver li ...... Après li sauté sus son zépée , li tiré dehors fourreau , et pis prendre pistolet et mordé dans son canon.... Pendant moment là , moi tremblé et moi demandé grace pour li..... . …………… . Mais li diré moi : « N'a pas contre toi que moi n'en a » colère ; toi , pauvre guiabe ! .... » Hélas ! oui , monchié , moi diré ; moi , pauvre saclave , jamais n'en a pas faire di mal à vous..... Enfin pourtant , li jetté son zépée , li remetté pistolet dans son place , li prendre son plume , li assisé tranquille , et li fini écrire sa billlet là moi porté vous. Ah vlà li.

( Strafford prend le billet, et fait signe à Jacques de rentrer ; Jacques s'en va . )

STRAFFORD lit le billet haut.

» Vous avez raison , monsieur , je suis mort pour vous et pour votre ami » .

( Il parle. )

Toi voir lui mort……….

(Il liz. )

« Je sens que je ne dois pas disputer » à Belton le cœur de miss Charlotte , sur- tout puis- » qu'elle l'aime , et je la lui cède. Valcour , mort ou » vif à votre choix , mais brave et honnête Eh bien ! toi comprendre à présent.

BELTON.

Moins que jamais ; c'est absolument une énigme pour moi.

STRAFFORD.

Mais , du moins , toi comprendre bien qu'il céder miss Charlotte pour toi ?

BELTON.

Je le vois , et c'est ce qui m'étourdit davantage. Estce que la tête vous tourne à tous deux ? ... Que signifie ce stile baroque de vos billets ?

STRAFFORD.

Il signifier , mon cher , que toutes les deux nous être vraiment braves et honnêtes comme il dire fort bien.... mais voilà mistriss ; nous va parler avec.


SCENE XI.

LES MÊMES, mistriss GEFFERSON vient de dehors ; ils la saluent tons deux : elle témoigne de l'embarras en voyant Belton , et veut rentrer chez elle sans parler, après avoir rendy le salut....

STRAFFORD arréte mistriss Gefferson.

OH non , passer pas vous encore.... Excuse, pardonne , mistriss .... mais voilà mon ami , la brave Belton , que son cœur i saignait devant vous , et vous que l'ame il être généreuse , i va donner consolation pour lui.

BELTON.

Ah! mistriss ! pouvez-vous , en changeant ainsi à mon égard , vouloir me désespérer.

Mistriss GEFFERSON, se retirant toujours

Permettez-moi , messieurs ....

STRAFFORD l'arrestant encore.

Ecoute , mistriss ; vous sauver ! vous pas vouloir parler pour nous..... Oh! besoin parler , quand faire la peine pour le monde , l'explication de la bouche il soulageait le cœur.

Mistriss GEFFERSON.

Messieurs , une mère a ses raisons qui la déterminent,

BELTON.

Des raisons ! ....

STRAFFORD, à Belton

Taisez-toi ; moi va dire meilleur encore . . .. Non mistriss , la raison il être pas ici .... Belton il être ein bon parti pour miss Charlotte : il aimer pour elle , il être aimé encore . j'osais dire parce qu'il être véritable et honnête , et que vous-même déjà il avait consenti honorablement , ... A st'heure , eine fantaisie il faire décider vous l'autrement ! .... mais vous va convenir qu'il pouvait pas être , et vous va retourner avec nous.

Mistriss GEFFERSON.

Je croyais , messieurs , n'avoir pas de compte à rendre de mes sentimens , et je m'étonne que vous m'en demandiez.

STRAFFORD.

Bien contraire , c'est nous qui rendaient à vous. Voir d'abord la signature de ce billet-là.

( Il lui montre le billet de Valcour. )

Mistriss GEFFERSON, regardant.

Je vois , Valcour.

STRAFFORD.

Vous connaître bien l'écriture ?

Mistris GEFFERSON.

Oui , il me paraît que c'est la sienne véritablement.

STRAFFORD.

Lire donc vous à présent ici.

( Il lui montre , en cachant le reste. )

Mistriss GEFFERSON, lit haut.

Je sens que je ne dois pas disputer à Belton let » cœur de miss Charlotte , sur-tout puisqu'elle l'aime , » et je la lui cède. VALCOUR. »

( Elle dit avec étonnement et confusion :)

Cela est positif.

STRAFFORD, vivement et avec ame.

Eh bien , ma chère mistriss ! nous chacune oublier la rancune , et revenir comme il était avant. Monsieur Valcour il être généreux et raisonable ; il voulait pas troubler eine inclination réciproque; vous montrer brave aussi , et consentir pour faire la bonheur de deux amans , que vous il avait déjà approuvé son tendresse.

BELTON.

Ah mistriss ! ne me rendez pas le plus malheureux des hommes ! .

Mistris GEFFERSON, à part.

Voilà qui me confond , et je n'ai rien à répondre.

( Haut )

Messieurs , je suis honteuse avec vous ; mais je dois tout vous dire . La demande de Belton ne trouverait aucune opposition de ma part ; mais je ne suis pas maîtresse .... mon fils aîné , sir Henri , est plus maître que moi , et il a déclaré qu'il n'accorderait sa sœur qu'à celui qui lui ferait avoir un poste qu'il ambitionne , celui de secrétaire du bureau de la marine.

BELTON, vivement.

Oh bien , je taupe très-volontiers à cette condition ; j'ai un ami intime qui a toute la confiance du ministre.

STRAFFORD.

Et moi , je connaître beaucoup la première commis du bureau , et je vas parler avec. Allons-nous ensemble. Mistriss , la poste il être sûr pour sir henri et quand nous il reviendra aussi , miss Charlotte il être pour mon ami Belton.

( Il le prend sous le bras , et ils sortent tous deux. )


SCENE XII.

Mistriss GEFFERSON, seule.

JE ne conçois pas comment Valcour , après l'empressement qu'il m'a témoigné , peut se dédire ainsi ; son procédé m'offense , et je veux m'expliquer avec lui.

(Elle va sonner à la porte de Valcour ; un nègre parait , elle lui dit :)

Je demande monsieur de Valcour.

( Le nègre rentre, elle redescend. )


SCENE XIII.

Mistriss GEFFERSON , VALCOUR sort de chez lui.

VALCOUR, venant à elle d'un air embarrassé et agité.

AH! mistris, que je suis confus de la peine que vous prenez ! ....

Mistriss GEFFERSON, gravement.

On m'a dit , monsieur , que vous renonciez à la main de ma fille , pour la céder à Belton ; j'ai voulu savoir de vous-même si c'était la vérité.

VALCOUR, faisant effort pour cacher les mouvemens qui l'agitent , dit enfin avec peine :

Oui , madame.

Mistriss GEFFERSON, avec dépit, mais toujours gravement.

Peut- on apprendre les motifs qui vous font mépriser notre alliance après l'avoir recherchée ?

VALCOUR, vivement.

Moila mépriser ! ... Oh ! ma chère mistriss , nevoyez , je vous prie, rien d'offensant pour vous dans un procédé que la délicatesse et l'honneur m'ont prescrit. Instruit que l'aimable Charlotte me préfère Belton , j'ai cru ne devoir pas abuser de votre autorité pour contraindre son coeur ; mais j'ai imaginé un moyen de conciliation . Comme , malgré sa beauté , c'était moins un amour décidé pour elle , que le desir de m'allier à votre famille , qui me la faisait rechercher ; comme d'ailleurs , sa sœur cadette , miss Henriette ne lui est pas inférieure en attraits et en qualités estimables , j'ai pensé que je pourrais accorder ma satisfaction avec la justice , en vous demandant la permission de lui reportermon hommage. L'alliance qui fait l'objet de mes vœux aura lieu tout de même , et vos deux demoiselles seront pourvues - à- la fois .

Mistriss GEFFERSON, lui tendant la main qu'il baise.

Cette explication raisonnable me raccommode avec vous ; venez donc , je vais vous présenter à miss Henriette , et je ferai agréer à mon fils les motifs de ce changement.

( Elle rentre chez elle avec Valcour. )


SCENE XIV.

STRAFFORD , BELTON revenant de dehors

BELTON, avec humeur.

ENCORE un obstacle , et une affaire de manquée !

STRAFFORD.

Oh oui ! la première commis il a dit pour moi que le brévet il être expédié depuis eine heure seulement.

BELTON.

Si du moins il avait voulu nous dire à qui .... en faisant des démarches et des sacrifices , peut-être .... mais il s'est obstiné à nous le cacher.

STRAFFORD.

Il faut aller lire toutes les papiers publics , et là sûrement , nous va apprendre bientôt ...


SCÈNE XV.

LES MEMES , FIJEAC sort de chez Valcour avec un paquet de papier,

FIJEAC , vivement à eux.

AH sandis , messieurs , pourriez- bous mé donner des noubelles dé mossu dé Balcour,

BELTON, froidement.

Nous ne l'avons pas vu.

FIJEAC.

Où diavlé s'amuse-t-i donc à la vagatelle , tandis qué lé ministre i ne s'occupe qué dé lui , et qué boilà un paquet dé la plus grande conséquence qu'il bient dé lui expédier.

STRAFFORD, avec intérest.

Cet paquet , dites- vous , ils viendre du ministre?

FIJEAC.

Eh cadédis dé lui-même ... et boilà vien le timbre : ministère dé la marine.

STRAFFORD, bas à Belton qu'il pousse.

Belton , ministère de la marine ! ....

( A Fijeac )

Eh I devine-vous bien-à-peuprès ce qu'il peut être là ?

FIJEAC.

Sandis , il est sûrément lé vrébet d'un emploi majur qué mossu dé Balcour il a sollicité ; et , comme lé ministre il n'a rien à réfuser à son mérite trascendant , il lé lui a accordé suvitément,

BELTON, à Fijeac,

Et encore, vous doutez-vous quel est cet emploi ?

FIJEAC , d'un ton de prétention ridicule.

Eh donc il est simplément lé sécrétariat dé la marine , rien qué ça.

BELTON, s'écrie à part avec douleur.

Oh ciel ! je suis perdu !

STRAFFORD, bas à Belton.

Au contraire , tu es sauvé ; je répondre pour toi de la place ; cours bien vite retrouver l'ami qu'il devait solliciter pour toi , dire lui qu'il demande à st'heure et j'assure à toi qu'il va avoir.

BELTON, bas.

Cela est impossible , puisque Valcour l'à .

STRAFFORD, bas.

Il pouvait pas avoir lui,

BELTON, bas.

Mais ...

STRAFFORD, bas , et le poussant.

Non , pas de mais ; parte tout de suite ; je répondre de tout.... aller vite.

( Belton sort. )


SCENE XVI.

STRAFFORD , FIJEAC.

STRAFFORD, allant à la table écrire.

MON ami, quand vous va remettre cet paquet à monsieur Valcour, je prier vous pour lui donner aussi ein billet que j'écrire là

FIJEAC.

Bolontiers , mossu , jé bous férai cé pétit plaisir.

(Apart part ,, pendant que Strafford écrit . )

Si je croyais qu'il fût chez mistriss , j'y bolérais pour lui donner plus bîte la satisfaction dé cette vonne noubelle ; ... mais s'il n'y est pas , il peut rébénir tandis qué j'y sérai moi , et jé né beux pas lé manquer: il baut mieux lé guetter ici d'arrache-pied.

STRAFFORD, se lève , et lui donne le billet qu'il a cacheté avec un pain.

Tenez , et gardez bien de l'oublier : il être fort intéressant encore.

( Il rentre chez lui. )


SCENE XVII.

FIJEAC, seul.

SANDIS! quel grand intérêt y peut-il y avoir dans un petit chiffon pareil? i n'est sûrement pas un autre vrébet ... Ah ! peut-être quelqu'affaire abantageuse qu'il lui annonce.... ( Il regarde le billet. Il est vien cachété Naturellément , ié né suis pas curieux ; mais jé n'aime pas qu'on mé fasse dé mistère .... Si cế n'était la discrétion , pourtant , jé saurais vientôt tout lé sécret : car lé pétit pain il est encore tour frais , et jé pourrais facilément lé souléber ... Jé fais réflession qué lé mossu il abait une singulière mine en écribant cé poulet ; qu'il abait même chuchotté tout vas abec l'autre qu'il est parti ! Qué diavle cé pourrait- il être ?...

( I retourne le billet en tous sens et l'entr'ouvre un peu. )

Il est trop vien fermé ; jé n'y bois rien ... Ehsandis, i n'en coûte pas dabantage dé sé contenter ; jé lé réfermérai toujours vien.

( Ill'ouvre. )

Ah ! cadédis , je suis pris ; boila mon maître. ( Il se retourne pour refermer le billet.


SCENE XVIII.

FIJEAC VALCOUR sort de chez mistriss , d'un air content.

VALCOUR, à lui-même.

ENFIN , c'est arrangé ; la mère est satisfaite , et je serai du moins tranquille de ce côté-là avec ce monsieur Strafford.

FIJEAC , allant à lui.

Mossu , je suis enchanté de bous boir en si velle humeur, et jé bais encore l'augmenter. Tandis qué bous étiez chez la veauté , la fortune et la gloire y sont benues bous chercher ici, Boilà un paquet dé la part du ministre.

VALCOUR, vivement.

Ah! donne.

( Ille décachette et le parcourt , pendant que Fijeac, en se retournant , achève de bien refermer le billet. )

( Avec joie. )

Dieu soit loué ! voilà que tout commence à me réussir à souhait .

( Haut. )

Mon cher ami , c'est le brévet du secrétariat que j'avais demandé , et je vais le porter sur- le- champ à mistriss Gefferson pour son fils.

FIJEAC, l'arrestant.

Un petit moment , mossu ; une vonne noubelle i né bient jamais sule. J'ai encore ici un autre villet à bous remettre , qué l'on dit trés-intéressant.

VALCOUR , vivement.

Du ministre aussi ?

FIJEAC.

Non-pas , i né bient pas dé la même main. Lé boici,

( Il lui donne en appuyant encore la main sur le cachet. )

VALCOUR, avec une forte émotion en voyant l'adresse..

C'est de l'écriture de Strafford ! ....

( Il s'éloigne un peu, l'ouvre vite et lit bas ; puis il s'écrie. )

Ciel ! .... Il se jette dans unfauteuil et laisse tomber le billet. )

FIJEAC, à part.

Eh quel diavle d'intérêt qu'il a donc mis dans cé villet dé quatre lignes ! .... ( Il voit que Valcour reste anéanti : il ramasse le billet avec précaution , le tirant d'abord avce le pied , et lit à demi-voix. ) « Bous faire toujours soubenir moi que bous il » être vivant ; bous abez ovtenu un emploi que mon » ami Velton sollicitait. Soubenez-bous donc bous- » même qu'il ne poubait pas être accordé à un homme » qu'il être mort ». Quel peste de varvouillage ! et qué céla i beut- ti dire.

VALCOUR, revenant un peu à lui.

O Dieu qu'elle situation terrible ! ....

FIJEAC.

Eh ! quest-ce donc ça , mossu , qui dit qué bous êtes mort.... et qué bous en faites vien aussi lé semblant bous-même.

VALCOUR, se relevant furieux.

Oui , mon ami , je le suis, et c'est Strafford qui m'a tué,

FIJEAC, étourdi.

Allons , boilà vien une autre histoire à cette hure! Est- cé qué les gens qui sont tués i marchent et parlent comme bous faites ?

(Apart, avec une réflexion presque comique. )

Ah! sandis , jé m'abise moi .... c'est qué peut- être il y a dé la poudre empoisonnée dans cé maudit villet , et qu'il a trouvlé la cervelle dé mon paubre maître ! .... Miséricorde ! qué jé lé jette bîte , qué jé sens déjà ma téte qui sé détraque aussi !

( Il rejette le billet. )

VALCOUR‚ à lui-même, avec une réflexionforte et douloureuse.

Céderai-je encore cette fois .... et dois-je en effet me regarder comme mort pour lui ?

FIJEAC.

Eh ! mais non , mossu ; ié bous garantis tout aussi bibant qué moi ..... et botre bisage i promet encore dé la santé pour plus d'un demi-siècle. Laisse-moi. Je te dis que Strafford m'a tué.

VALCOUR , s'égarant encore.

Céderai-je encore cette fois .... et dois-je en effet me regarder comme mort pour lui ?

FIJEAC , avec impatience.

Mais cadédis , bous me feriez débénir fou .... sinon qué bous l'abez rêbé ..... Dé quelle maniére donc qu'il hous aurait tué , puisqué vous mé le dites ? ...

VALCOUR, avec une fureur concentrée.

Je l'ai provoqué au combat.....

FIJEAC.

Eh vien , lé comvat i n'a pas été murtrier ; car , Dieu merch, bous n'êtes vlessés ni l'un ni l'autre.

VALCOUR , lui serrant le bras fortement.

Si fait ;je suis mort.

FIJEAC , criant et secouant son bras.

Oh! non , dé par tous les diavles ! Jé lé sens vien , et jé bous en réponds..... , Mais expliquez-moi donc ce logogrife , je bous en prie.

VALCOUR, d'un ton farouche et vivement.

Sous prétexte qu'il était plus fort que moi aux armes , il m'a proposé de tirer au sort à qui aurait le pistolet pour tuer l'autre. Dans ma fureur , je l'ai accepté. Nous avons joué aux dez ; il a gagné le pistolet , et ma vie est maintenant à sa disposition.

FIJEAC , s'écriant.

Ah! Satanas ! quel diavle dé jeu enragé qué bous abez joué-là ! ... Mais , mon cher maître , je pense une chose , iéquel est-ce qui a fourni les dez ?

VALCOUR

C'est Strafford.

FIJEAC , s'écriant comiquement.

Eh vien , mossu , iz étaient pipés.

VALCOUR.

Oh ! c'est un homme d'honneur ; il est incapable de cette infamie.

FIJEAC.

Eh, sandis ! on a fait cette fripponnérie à des parties de bien moins de conséquence.

VALCOUR, après une réflexion , à lui-même.

Oui , je le dois à mon honneur ; je lui cède encore cette fois. Je vais renvoyer le brévet avec mon désistement.....

( Avec force et colère concentrée. )

Mais c'est bien le dernier sacrifice que je lui ferai.

( Brusquement à Fijeac. )

Va dire à Strafford qu'il sera satisfait,

( Il ramasse le billet , et retourne chez lui. )

FIJEAC.

Il suffit , mossu.....

(Par réflexion , il court à lui. )

/ Eh , dites-moi donc encore , est- cé-ti au plus haut point qué bous abez joué ?

VALCOUR , déjà sur sa porte.

Oui , et il a amené 18.

( Il rentre chez lui. )


SCENE XIX.

FIJEAC , seul , s'écriant vivement.

18! raffle dé six ! .... Quand jé lé disais ... Certes, jé lé gagérais qué cé mossu l'Anglais il est un escamoteur , et qué ses dez i né sont pas dé von alloi ... Comment diavle m'y prendrai-je-ti pour bérifier lé fait ? Il rêve. ) Raffle dé six ah ! sandis , il est von comme ça ! Jé lé tiens , et jé bas rétirer l'enjeu dé mon paubre maître , et lé ressusciter....... Il faut qué jé lé défie à mon tour..... Mais déssous quel préteste ? I ne boudra pas sé mésurer abec un domestique.

( Il rêve encore. )

Oh! j'y suis . Pour lé coup , il né pourra pas s'en défendre. J'ai fort hurusément aussi des dez dessus moi.

( Il les tire de sa poche , et les roule sur la table. )

Ils sont braves ; mais j'ai remarqué qu'ils tournent plus bolontiers , au petits points , et jé bais lé prendre par lé moyen des conditions qué jé bas écrire là d'abance.

(IL dit en écrivant )

« Lé plus vas point il aura lé pistolet »... Ah! mossu dé la raffle dé six , j'espére qué bous allez y être pris dé cette fois.

( Il écrit encore un peu; puis il ploie le papier, et vafrapper à la porte de Strafford. )


SCENE XX.

FIJEAC , STRAFORD sort de chez lui.

FIJEAC, d'un ton important.

Mossu, j'ai remis bostre villet à monsieur dé Balcour, il la lu attentibément , et il m'a prié dé bous dire qué bous seriez satisfait , et qu'il allait renboyer le vrébet.

STRAFFORD.

Très-bien , je suis content. Adieu , mon garçon.

(Il va pour rentrer chez lui. )

FIJEAC, l'arrête.

Adieu , mon garçon ! .... Ah ! si bous êtes content dé mossu dé Balcour , moi jé né lé suis pas dé bous ... Quest-cé qué c'est qué des garçons ! ..... un terme dé mépris céla ! .... Déjà tantôt qué bous il est abez pris cette familiarité abec moi ; j'abais cette insulte sur le cur ! .... et maintenant jé bous démande raison dé la récidibe.

STRAFFORD.

Eh ! qu'est-ce que vous il demande moi ? est- ce que vous n'être pas valet de Valcour ?

FIJEAC, jouant la colère de l'orgueil.

Qu'appellez-bous , balet ! ... sandis , apprénez qué jé suis le goubernur et l'ami de mossu dé Balcour ; qué la race des Fijeac dé Craquignac dont cé qué j'ai l'honnur d'en être issu, est une des plus anciennes et des plus novles dé la Garonne , et que je suis gentilzhomme en droite ligne , et dé père en fils , jusqu'à la dernière génération.

STRAFFORD, bonnement.

Excuse-moi donc , je connaissais pas encore votre noblesse.

FIJEAC.

Eh donc , jé bous la déclare et bous la manifeste ... et maintenant qué bous la connaissez tout aussi vien que moi , vous debez croire qu'un novle dé ma trempe i né sé contente pas abec des excuses bervales.

STRAFFORD.

Qu'est-ce que vous il exigeait donc de plis encore ?

FIJEAC, faisant de l'embarras.

J'esige , monsieur , qué la pointe dé la lame il en découse par une et deux ....

(Il fait le geste de tirer une botte. )

Ou qué lé canon du pistolet il emporte abec une valle la trace dé l'insulte dont cé qué bous m'abez déshonoré..... En un mot , jé vous défje.... Et , comme je suis tout aussi vrabe qué monsieur de Balcour, jé bous joue lé même jeu qué lui.

STRAFFORD.

Comment , monsieur le gouverneur , vous vouloir forcer moi pour tuer vous aussi.

FIJEAC.

Oh ! jé dis , mé tuer ! .... I n'est pas encore décidé comme quoi que la chance y tournéra…….. Mais , à tout hasard , jé beux bous prouber qué la bie i né m'est rien qu'un fétu au régard de l'éclat dé ma réputation et dé ma novlesse.

STRAFFORD.

Eh bien , monsieur , puisque vous voulez , il faut contenter pour vous. Je reviendre toute suite.

(Il rentre chez lui. )


SCENE XXI.

FIJEAC , seul.

ALLONS , cadédis , le sort il est jeté , Jé né beux faire aucun mal à ce homme ; mais jé beux lui rayattre son orgueil , et délibrer mon paubre maître des griffes dé son pistolet.


SCÈNE XXII.

FIJEAC , STRAFFORD revient avec , le pistolet les dez , les cartes et la bourse de guinées ; il met le tout sur la table.

STRAFFORD.

ALLONS , choisir vous , monsieur gentilhomme la Garonne.

FIJEAC

Jé bous ai dit qué jé suis aussi hasardeux qué monsieur dé Balcour, et jé m'en tiens aux dez comme lui.

(Il regarde la bourse pleine de guinées. )

Qu'est-cé qué c'est-ti qué cette vourse , où cé qué jé bois dé l'or dédans ? Est- elle dé la partie ?

STRAFFORD.

Non, monsieur ; il est des guinées pour prendre dedans chacune , au cas que vous voulez jouer pair ou non.

FIJEAC.

Oh bien , non ; comme ié bous ai dit , jé mé fisque sur les dez..... Et il est d'autant plus commode , qué bous abez les bôtres , et moi j'ai les miens ; chacun í sé serbira dé ses propres armes.

STRAFFORD.

Tout comme il plaira à vous. Tirer , monsieur ; je cède la primauté.

( Îl lui donne le cornet. )

FIJEAC.

Bon ! j'accette la politesse ..... Boilà un papier qué jé bous rémets , où cé qué les conditions dé notre comvat i sont expliquées.... Mais bous né lé lirez qu'après lé tirage.

STRAFFORD.

Soit ; je consentais encore tout de même. Roulez , monsieur.

FIJEAC , mettant ses dez dans le cornet,

Lé pistolet il est-i vien chargé ?

STRAFFORD.

Trois balles dedans , et double amorce.

FIJEAC, remuant les dez dans le cornet.

Sandis il est un joli passeport pour lé perdant, "

( Il jette les dez. )

comptez , mossu , boilà jouez à présent abec les bôtres , et laissez les miens sur la tavle , pour serbir dé témoins.

( Il lui donne le cornet. )

STRAFFORD , mettant ses dez dedans.

Très-volontiers. Ils témoignent que vous n'avez pas beau jeu ; et même , j'acquitte vous encore , si vous voulez.

FIJEAC, triomphant.

Oh! nenni pas , sandis ! je l'ai plus veau qué bous pensez.. Jouez toujours , et lé papier après i bous dira le reste , mossu dé la raffle dé six .... né ....

STRAFFORD, remuant le cornet.

Pourquoi pas ? toutes les points , il être dans le jeu.... Tenez , monsieur.

( H jette les dez. )

FIJEAC, regarde , et s'écrie au désespoir.

Trois as ! ... ahlé magicien d'homme .. sorcier abec ses raffles 1

STRAFFORD, tranquillement.

il est Certes , j'avais perdu avec ein belle espérance ! .. Voyons donc la papier.

( Il le prend et l'ouvre. )

FIJEAC, frappant des pieds et des mains .

Oui, perdu 1. ... Faut-i pas qué lé diavle i s'en mêle .

STRAFFORD, lit haut

« Le plus bas point il aura le pistolet » . Oh ! gaddem ! il être bien différent à st'heure ; il m'appartient donc.....

(Il le prend. )

Eh bien , monsieur la noble jusqu'à dernière génération !. vous il y être arrivé toute suite , et voilà votre noblesse il être éteint tout-à-l'heure. Allons, dépêcher nous. être-vous prête ? Il lui présente le pistolet.

FIJEAC, recule effrayé , en s'écriant

Eh ! non , eh ! non ; pas encore .... Sandis ! bous êtes donc plus pressé abec moi qu'abec mossu dé Balcour ?... Lisez cé qué j'ai ajouté au vas,

STRAFFORD , lit haut.

« Le perdant sera à la disposition du vainqueur ; mais il aura vingt-quatre heures pour mettre ordre à affaires ».

FIJEAC, vivement.

Oui , mossu , c'est-là ma condition espresse , et sine quâ non ; et jé bous réponds qué jé profitérai vien du terme dé répit.

STRAFFORD, ramassant toutes ses affaires qu'il met tranquillement dans ses poches.

C'est bien , monsieur , je donnais à vous les vingtquatre heures ; mais après manquer pas vous pour revenir , et les trois balles qu'il être ici ,

( Montrant le pistolet. )

i va changer place , et moi loger là-dedans la tête d'un gentilhomme.... Pon adieu la génération... Hondyedouser....

( A part. )

A st'heure je m'en vais faire mon visite pour ma chère miss Henriette.

( Il va chez mistriss Gefferson , et, quand il est à lala porte , il se retourne , montre le pistolet à Fijeac, en lui disant. )

Poun ! ...

( Il rentre. )


SCENE XXIII.

FIJEAC , seul.

Οui , poun !... compte là-dessus.... Sandis ! jé né té laissérai pas lé tems dedé faire cé beau pon-là ..... et jé t'en réponds....

( Il se jette dans le fauteuil. )

Ah ! la malhuruse inbention que j'ai eue-là


SCENE, XXIV.

FIJEAC, dans le fauteuil VALCOUR, sort de chez lui avec un papier à la main.

VALCOUR, dès sa porté.

TIENS , va porter cela au bureau de la marine.

( Fijeac ne répond pas. Il avance à lui . )

Eh bien ! que fais-tu donc là ?

FIJEAC , piteusement , sans bouger.

Hélas ! mossu , je suis mort.

VALCOUR.

Comment mort ! ...

FIJEAC , sans se lever.

Oui , mossu , ni plus ni moins qué bous . Bostre diavle d'Anglais , il est un magicien qu'il a toutes les raffles à son commandement.

VALCOUR.

Je ne te comprends pas.

FIJEAC , toujours assis:

Ni moi non plus ; car ça béritablement, i mé passe ! .. Imaginez-bous , mon cher maître , qué pour bous délibrer du maudit pistolet , j'ai cherché à lé régagner à cet homme , qu'il est vien , jé crois , possédé.... Mais , pour lé surprendre , j'abais espécifié dans un écrit qué lé plus vas point i gagnerait.... et j'avais des dez qué jé pensais vien dé pouboir m'y fier déssus..... Effettibément , j'amène quatre, et jé croyais déjà vien ma bie et la bostre en sûreté... lorsqué cé diavle dé sorcier il jette les siens , et i m'emporte lé pistolet par une raffle d'as....

VALCOUR.

Eh bien , mon ami ! mon brave Fijeać ! je te remercie de ce beau trait de dévouement pour moi......... Mais à présent il faut te résigner comme j'ai fait.

FIJEAC , se relevant vivement , s'écie.

Non , cadédis ! qué jé né mé résigne pas ! ... Hurusément que j'abais eu la sage précaution d'espécifier aussi bingt- quatre hures dé répit entre la sentence et l'exécution , et j'en vas profiter pour mé mettre déhors dé la portée dé son maudit pistolet carabiné..... Il y a justément en rade un nabire qui doit partir cette nuit à la marée montante , et jé bas mé serbir dé l'occasion,

VALCOUR,

Comment ! tu veux t'en aller ?.

FIJEAC.

Oui , certes , qué jé lé beux. J'aime mieux faire un pétit boyage qu'un grand . et jé bous inbite trèsfort à faire de même ..... sinon , ayez pour agréavle , mon cher maître , qué ié vous prie dé bous ressoubénir des pétits gages qué bous me rédébez , et dé bouloir vien mé les solder , pour qué jé puisse mé payer mon passage.

VALCOUR.

Cela est juste. Quand tu auras porté ce paquet-là , je te ferai ton compte , et je te donnerai en outre des témoignages de ma reconnaissance.


SCENE XXV.

LES MÊMES , STRAFFORD sort en colère de chez mistriss Gefferson.

STRAFFORD , à lui- même , sans les voir.

OH! pour celle- là , il va être trop fort , assurément !... Il vouloir prendre à présent mon maîtresse ! ..... Oh ! nous va voir ! …….

( Il avance , et voit Valcour et Fijeas. Il tire son pistolet. A Valcour, )

Ah ! vous voilà ! ... Eh bien , monsieur , être vous prêt cette fois ? VALCOUR, d'un ton brusque et ferme. Oui , monsieur , débarrassez-moi.

FIJEAC , tremblant.

Eh ! mossu , soubenez-bous donc qué j'ai bingt-quatre hures.

STRAFFORD , avec un gestefort et de mépris.

Décamper toi , lâche.

FIJEAC , partant vite.

I n'y a pas de lâcheté , mossu ; j'osserbe les conditions.

( Il rentre chez Valcour. )


SCENE XXVI.

VALCOUR, STRAFEORD.

STRAFFORD, avec flegme , mais dépit.

ECOUTE-MOI ,, vous VO , brave monsieur Valcour , er juger vous-même. Suivant notre convention aussi , vous il être bien mort avec moi ... Je devais croire du moins ... Pourtant mistriss Gefferson , à st'heure , il viendre dire pour moi que vous il demandait pour mariage miss Henriette , son fille , que j'aimais moi depuis long-tems , et qu'il allait donner pour vous .... Ainsi vous voir que je trouve toujours vous par-tout pour faire enrager moi dans mes affaires , dans mes amis et dans mon maîtresse même ; et comme ça il ne pouvait pas rester plus longtems , décider vous ; voilà encore un article que vous il devait céder moi , la main de miss Henrietté,

VALCOUR, outré,

Oh! morbleu ! monsieur , c'est trop de sacrifices ! et j'aime mieux mourir unefois que d'être continuellement soumis à vos lois tyranniques .

( Plus fort encore. )

Je ne veux plus rien vous céder. J'ai bravé la mort à laquelle j'ai bien voulu m'exposer, en vous provoquant; mais je n'ai pas voulu me rendre votre esclave. Tirez, monsieur.

( Il lui présente sa poitrine. )

STRAFFORD, froidement.

Vous avez du courage et de l'honneur , monsieur , je savais bien ; mais j'ai aussi , moi , et je voulais donner à vous ein revanche.

( Il tire son pistolet en l'air. )

Voilà la pistolet tiré ; je n'avais plis droit sur vous..... Mais voilà ein autre à st'heure ; nous va rejouer pour celle- là . Peutêtre vous il sera plis heureux ; et , si vous gagnez , vous délivre moitoute suite du chagrin de rencontrer toujours vous pour barrer moi.....


SCENE XXVII et dernière.

Au bruit du pistolet tout le monde vient. ) LES MÊMES ; mistriss GEFFERSON sort de chez elle , BELTON rentre de dehors , et FIJEAC sort de chez Valcour.

Mistriss GEFFERSON.

EH! mon Dieu ! qu'est-ce là ?

BELTON, courant à Strafford.

Quest-ce que c'est , mon ami?

FIJEAC, à Valcour.

h sandis il est- ti tout dé bon cette fois ? ...

STRAFFORD, tranquillement.

Il n'être rien encore , attendre ein instant , il va être fini.

( A Valcour. )

Allons , monsieur , nous achever le partie.

VALCOUR, avec noblesse et sentiment.

Non , monsieur , votre conduite loyale a terminé notre querelle ; vous ne m'avez pas vaincu par le courage , et vous me décidez par la générosité. Puisque vous êtes premier en date , la justice obtient de moi ce que jamais la violence n'aurait pu me faire céder. Messieurs , les deux demoiselles Gefferson vous préfèrent tous les deux ; soyez donc heureux ensemble tous les quatre. Voilà le brévet du secrétariat que je vous remets pour sir Henri , et pour servir de gage à votre double union ; je ne vous demande ainsi qu'à madame , que de me regarder dorénavant comme un ami sincère de toute votre famille..

Mistriss GEFFERSON, avec affection.

Vous le méritez , et nous nous en ferons tous honneur.

STRAFFORD , à Belton.

Goddem! il faire rougir moi à st'heure ... mais j'admire et je remercie ...

( A Valcour avec enthousiasme. )

Embrasse pour moi , brave homme ! ....

( Il le serre dans ses bras. )

FIJEAC, se coulant derrière Strafford et son maître.

( A Strafford, )

Dites zun peu , mossu ; en quittant lé pistolet abec mossu dé Balcour, l'abez bous aussi quitté dé déssus moi ?

STRAFFORD, riant.

Oui , oui , mon ami ; à st'heure , toi il pouvait rester vivant tout-à-fait.

FIJEAC.

A la vonne hure ; et je promets vien dé né plus réjouer dé partie si scavreuse !

AU PUBLIC.

Jé crois même qué si l'on aménait la mode dé cé duel là , il pourrait réténir et réfroidir vien des maubaises têtes !