Sisca à de Cinéma
Jules Watteuw, 1925-08-23
Ze l'attender toujours y parler de chinéma
et de chinéma, y moi dire ze vas prouver aller.
Ze prenne ma biet à de porte et ze moi entrer
à de théãte de Menher Chinéma.
Ze voyer dans de place tout de zens qui par¬
ler, y rier. Y manzer de couques, de l'oranzes
Ze l’attender crier : Hél Batisse! Hél Louise
Ze voyer Z'ézéphe de marcand d'oces qui
crier : Hé! Sisca! te buver un goutte? Eit
y montrer à moi un boutelle de zénéfe.
Vela que ze sentir qui tirer mon zupe, ze
moi tourne et ze voyer Euzène de peintrer, qui
dire à moi : « Tiens, vela Siscal » - Bon¬
zour, Euzène, que ze moi dire ; te sais c'est de
première fois que ze venir à de chinéma? »
« Alleie, y dire Euzène, assiez à côté de moi,
ze vas tout spliquer, moi ze l'a tout peintré
de théãte avec de couleur. Ze connaîtrer tout,
moi, ouh! iou iou ; ze vas tout splique. »
Et ze moi mettrer à de côté d'Euzène.
Vela que tout d'un coup y soufler de leu¬
mière et y faire brinl! Ze moi crier...
" Chut! y dire Euzène.. gardez, Sisca.. »
Et ze voyer sur de théãte tout de zens.. I
de femmes.. y de z'hommes.. y de soldates...
y aller.. y promener.
- Gardez, Sisca, y dire Euzène : te voyez
ce l'homme avec un bonnet à poils sur son
téte? - « Oui ze dire.» - « Et une grande
plumet? -- « Oui ze dire. » -- « Et de
grands moustaces ? » -- « Oui, ze dire. »
Eh bien ! y dire Euzene, c'est Lapoléon !
Bah! moi ze dire.. c'est Poléon? Ah !
c'est lui... Ze pense que ze l'a tendu parler de
Poléon.. Et quisque c'est ce Medame la?..
Ca, y dire Bugène, c'est la femme de
Lapoléon, le Reine de Zipe...
-- Ah! moi ze dire, y un belle femme Po¬
léon.. Tenez, gardez, Euzène, quisque c’est ce
femme qui tourner de caté?
Ca, y dire Euzène, c'est de Reine de
Gleterre.- c'être de belle sœur à Poléon.. Gar¬
dez, y dire Euzène, vous te aller voir un grand
despute.
De reine de Cique y prenne sa panier et y
parler à Poléon...
--Qu’est-ce qui faire? moi ze dis.
- Chut! y dire Buzène, y demander à Po¬
léon de chous pour aller faire de commission..
Poléon y veut pas donner... de belle-sœur de
Reine de Gleterre, y montrer de poing à sin
nez. y poigner Poléon par sin meustace..
Poléon y parler avec son bras et son zampes.
Moi ze lever et ze crier :- « Poléon, par¬
lez un fois plus haut; ze n'a pas encore com-¬
prenne un mot... n
Et vela que tout de monde y rier, y crier :
Bravo!
On allumer de gaz et tout de zens y faire :
« Ahl » Vela que de meusique y zeuer : « Viens
Poupoule » et moi ze çanter avec de musique :
Viens Popole, viens Popole,
Viens l
Ah! ca y bien demace
Vous toujours en veyace
Ia l
Viens Popole, viens Popole,
Viens !
Sur de trõne assier
Et ne plus veyazer.
Tous de zens y crier : « Bravol » On souffles
de gaz et y faire brin !
- Gardez, Sisca, y dire Euzène, on va aller
nouer une drame...
Ah! ne moi dire, et qu'est-ce que ca été
une drame?
Ca, y dire Euzène, ze vas vous splique,
une drame c’est de Cloces de Corneville, gar
dez.
Et ze voyer venir sur de théâte, un Meda-
me avec sa petite enfant qui est tenu par un
ficelle.. et une cien dans de petite veture...
Y rentrer dans de maison.. y de soir... y al
leumer de çandelle.. de petite cien y gratter
à de cour... Medame y lever... y ouvrir de por¬
te.. y mette son petite l'enfant à de cour et
y prenne sa cien à bras pour faire lui dodo..
Moi ze dire à Euzène « D'ous qui sont
les cloces de Querneville? mois ze la pas en-¬
core voyer... »
Chut ! y dire Euzène, gardez..
Vela que de Medame y monter en haut pour
porter son petite l’enfant dans sa lit..
Gardez, Sisca, y dire Euzène.
Zésusse, Christusse : ze voyer venir une bri¬
gand.. avec de méçantes z'yeux. qui tenir une
couteau dans son main... ouvrir de meubles..
y cercer après de l’argent, mais y entendu de
bruit.. y cacer lui dans l'armoire, de Medame
y descender, y garder tout rond...
Moi, ze lever et ze crie « Hé! Madame,
prends garde; de brigand est cacer dans
l'armoire.»
Et vela que de meusique y jeuer de Tonki
noise et moi y canter avec de meusique :
En est un petite beurzoise
De ta ki ki, de ta ki hi
De Ta kinoise.
On souffler de gaz et y faire brinl
Chutl gardez! y dire Euzène...
Ohl iou, iou, y belle cateaul... y de sol¬
ciates et de Medames promener à la badine.
Qu’'est-ce que c’est ça Euzene?..
--Ca? y mo dire, c'est un féerie...
Ah! un fait rire? moi ze aime bien rirer,
gardez Euzène, quisqui venir ?
Ça, y dire, c'est un fée avec son ba¬
guette. Ce fée y lever son baguette et tout
de zens de Medames et de soldates y s’envoler
et, à de place y venir de femmes avec de gran¬
des bas blancs et de petites zupes, y danser..
Ca y dire Euzène, c'est de ballet...
Vela que de femmes y lèvent son rampes en
l'air, y danser, y faire des baisses avec son
main.
Ze moi dire à Buzène :
--Ous qu'il est?
--Quoi?
--Bé de balai, ze l'a pas encore vu de
balai!...
Chut! y dire Euzène, gardez..
Ah! ze moi crier ; quisqui l'a moi pincé
à mon fesse. Ouhl iou iou.
Et ze moi lever tout haut et ze donner de
calottes à tout de côté.. tiens, vela l
Tout de monde y crier « CA la portel A la
portel.. Y venir une Mossieur qui prener ma
bras et faire moi sortir et moi dire : - « Allez
vous faire pincer ailleurs.
Ah! c'est vous, Mochieur Chinéma? Le
moi dire, bé, vous t'es une malhonnẽte.
Et voilà que de meusique y zeuer : « Au
z'voir et merci, merci, merci...
Tout de sens y sortir et moi ze suis été véro¬
blizé de sortir avec, te comprenne ?
Quansque ze l'a été sur de rue, ze moi crier :
« Ne pas de bon sens y pincer moi comme ca¬
Ze ne jamais, plus venir: ze aller faire de
théaate de chinéma à mon maison avec de bon
goutte de café. Et si ze vouler été moi pincé,
ze pincer moi-mẽme ; ze n'avoir pas besoin de
vous autes, sais-tu.. Zamais plus, Mochieur
Chinéma y verra moi. »
« Ouhl iou iou, qui pique à mon fesse, ze
vas moi aller mettre un compresse.