Pitche

Jules Watteuw, 1927-03-13


Pitche

Accoute un fos, mo ne pas bête,

Et ma me pèr’ lui touzours dit

Que mo ze l’avais dans me tête

Fort touzours, beaucoup de l’esprit.

Ah! io, io, io, ça y vrai, saite.

Mo y tenir petit’ cab’ret

Qui appeler de Gris Baudet,

Quansqui venir vous te peux dire

Si te buvez un’ verr’ de birre

Te vous penser y zustemint

Que te buvez un’ verr’ d'e vin;

Quansque te mettez dans ton bouce

Y frais... y bon... y douce.

Et ma zenèf’ lui fair’ de cap’let

Te buvez zuss’ comme de luit.

De nouvel an, de zour de trenne,

Me femme aller voir se marraine,

Mo, y tout’ seul à ma cab’ret.

Un homm" avec un grand capote

Ouvre de porte ly lui rentrer,

S’assier, mais zamais parler.

Ze dis : vêla un’ drôl’ de pôte.

Et mo y aller demander

Tout près cinsque lui va buver...

Y pas parler, y fair’ des sines

Avec ses doigts, comm’ de miacines

Et cont’ son bouq’ venir, aller.

Comme’ lui veut dir’ donne à manzer.

Ze dis : te volez de côt’lettes?

Fair’ sine que non avec son tête...

Ze dis : te volez du zambon ?

Y lui encore fair’ sine que non.

Ze dis : te volez de zardines,

De fromace avec de tartines?

Allons, veyons dit, ot’ferdek

Te vous te volez un bifteck?

(Lui dir’ que non avec son tête.

Ah! mais, accout’, mo ne pas bête.

Mo aller cercer de p’tit blanc

Mett’ dans son main et â lui dire :

Accout’ Menkerr’ vous vais écrire

Cins’ que te volez sur de banc.

Y dir’ merci avec son tête;

• Y prenn’ de blanc, y crir’ de lettes

Tout zuste tout de long de banc.

Ah! ouais, mais, mo pas à me n’aise

Lui écriver de lett’ anglaises

Et mo savez lir’ foq’ flamand.

Mo y lui dir’ ne pas comprenne,

Si vous te volez attender,

Mon femme aller voir se marraine

Quans qui venir te lui s'pliquer.

Ah! mais, l’ingîais lèv’ tout d’in craque

Va dans un’ coin de ma caib’ret,

Mett’ à crou crou, lèv’ son casaque

Et comm’ un poule lui y criait :

Cot, cot, cot, cot, cot, cot, codaque!

Et touiller comm’ dans de couet.

Mo y comprenn’ c’est de l’om'lette

Qui demander. Mo y pas bête.